Le comité de règlement des différends et des sanctions est saisi des faits suivants.
Le 28 septembre 2016, M. Alexandre C. a déposé une demande de permis de construire pour la réalisation d'une maison à usage d'habitation sur la commune de L. Dans ce cadre, la société ENEDIS a été saisie pour avis par les services instructeurs de la commune en sa qualité de gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité. L'avis rendu par cette société le 24 octobre 2016 conclut à la nécessité de réaliser une extension du réseau de distribution d'électricité sur une longueur de 40 mètres pour un montant total de 3 246,82 euros.
Cette première demande de permis de construire de M. C. a été refusée le 11 novembre 2016.
M. C. a déposé une nouvelle demande de permis de construire le 23 décembre 2016, sur laquelle la société ENEDIS a rendu un avis le 1er février 2017. Cet avis conclut à la nécessité de réaliser une extension du réseau de distribution d'électricité de 420 mètres et de créer un poste de distribution publique, pour un montant total de 67 336,66 euros.
Par une décision du 16 février 2017, le maire de la commune de L. a rejeté la nouvelle demande de permis de construire présentée par M. C. au motif que le terrain n'est pas desservi par le réseau public de distribution d'électricité et que la commune n'est pas en mesure de préciser dans quel délai et par quelle collectivité les travaux d'extension pourront être réalisés.
Vu la procédure suivante :
Par un courrier enregistré le 30 avril 2019, M. C., représenté par Me Jenny CARLHIAN, doit être regardé comme demandant au comité de règlement des différends et de sanctions de se prononcer sur la validité de l'avis rendu par la société ENEDIS le 1er février 2017 dans le cadre de l'instruction de sa demande de permis de construire.
M. C. soutient :
- qu'aucune circonstance nouvelle intervenue entre le dépôt de ses deux demandes de permis de construire ne serait de nature à justifier la divergence entre les deux avis successivement rendus par la société ENEDIS s'agissant de l'ampleur des travaux d'extension à réaliser afin de raccorder la construction projetée au réseau public de distribution d'électricité ;
- que l'existence d'autres projets de construction dans la zone ne saurait justifier les travaux d'extension du réseau envisagés par la société ENEDIS dans son avis du 1er février 2017, dès lors que seuls les travaux d'extension rendus nécessaires pour raccorder son seul projet de construction auraient dû être pris en compte ;
- que le contenu de certains avis rendus postérieurement par la société ENEDIS s'agissant de projets de construction similaires au sien sur des parcelles voisines de la sienne démontrerait qu'aucune extension du réseau ne serait en réalité nécessaire et que l'avis rendu par la société ENEDIS le 1er février 2017 ne serait, par suite, pas justifié techniquement.
Par un mémoire en défense enregistré le 29 mai 2019, la société ENEDIS, représentée par son président du directoire, M. Philippe MONLOUBOU, et ayant pour avocat Me TRECOURT, demande au comité de règlement des différends et des sanctions de :
- à titre principal, constater l'absence de saisine utile de la part de M. C. ;
- à titre subsidiaire, se déclarer incompétent pour statuer sur la saisine de M. C. ;
- à titre subsidiaire, rejeter l'ensemble des demandes de M. C.
Elle soutient :
- que la saisine de M. C. est irrecevable dès lors qu'elle ne comporte aucune demande à l'encontre de la société ENEDIS et n'est assortie d'aucun moyen de droit ;
- que le comité de règlement des différends et des sanctions est incompétent pour connaître du présent différend dès lors que ce dernier ne relève pas des cas de figure énumérés à l'article L. 134-19 du code de l'énergie ; qu'en effet, si un litige existe entre M. C. et la commune de Lorgues s'agissant du refus opposé par cette dernière à sa demande de permis de construire, aucun refus de raccordement n'a en revanche été opposé à M. C. par la société ENEDIS ; qu'une éventuelle contestation de l'avis rendu dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire ne saurait, en tout état de cause, relever que de la juridiction administrative qui se trouve actuellement saisie d'un recours dirigé contre ce refus de permis ;
- que l'avis rendu par la société ENEDIS et dont M. C. conteste le bien-fondé est destiné à l'autorité chargée d'instruire la demande de permis de construire ; que cet avis, rendu en application des règles d'urbanisme et qui est purement consultatif, ne fait donc pas grief à M. C. et n'est dès lors pas susceptible d'être discuté par ce dernier devant le comité de règlement des différends et des sanctions ;
- que la différence entre ses deux avis rendus le 24 octobre 2016 et le 1er février 2017 est justifiée par l'évolution de l'état du réseau, notamment en raison de l'existence de plusieurs autres projets de raccordement.
Par un mémoire en réplique enregistré le 29 août 2019, M. C. demande au comité de règlement des différends et des sanctions :
- de constater que l'avis technique du 1er février 2017 est erroné et injustifié ;
- de mettre en demeure la société ENEDIS de lui apporter les informations nécessaires concernant le raccordement des parcelles voisines à la sienne dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir ;
- de mettre en demeure la société ENEDIS de réétudier le projet de raccordement et de lui communiquer une proposition technique et financière, dans un délai d'un mois à compter de la décision à intervenir ;
- d'enjoindre à la société ENEDIS de procéder à ses frais exclusifs aux travaux de raccordement de sa parcelle, dans l'hypothèse où le coût des travaux permettant le raccordement serait supérieur à la proposition initialement émise et jointe à l'avis d'octobre 2016 ;
Il soutient :
- que sa saisine est recevable dès lors qu'elle contient l'exposé de ses demandes et des moyens de fait et de droit qui les fondent, conformément aux dispositions des articles R. 134-8 et R. 134-13 du code de l'énergie ;
- que le comité de règlement des différends et des sanctions est compétent pour statuer sur sa demande dès lors qu'il est utilisateur du réseau de distribution d'électricité et qu'il s'est vu refuser l'accès au réseau à la suite de l'avis technique rendu par la société ENEDIS le 1er février 2017 ;
- que le recours en annulation qu'il a introduit contre la décision de refus de permis de construire en date du 16 février 2017 est inscrit au rôle de l'audience du tribunal administratif de Toulon du 20 septembre 2019 ;
- que l'avis rendu par la société ENEDIS le 1er février 2017 sur lequel se fonde le refus de permis de construire litigieux est erroné et insuffisamment motivé ;
Par un nouveau mémoire en défense enregistré le 30 août 2019, la société ENEDIS conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens.
Elle fait en outre valoir :
- que l'avis technique rendu dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis de construire ne constitue pas une réponse à une demande de raccordement ; que cet avis constitue un acte préparatoire insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;
- qu'il revient à l'autorité communale, dans le cadre du large pouvoir d'appréciation dont elle dispose, d'assurer la maîtrise de l'urbanisation de son territoire ; qu'en l'espèce, un mois après avoir refusé la demande de permis de construire de M. C., la commune de L. a modifié son plan d'occupation des sols en classant la parcelle concernée en zone naturelle et inconstructible, ce qui révèle le souhait de l'autorité communale de ne pas la viabiliser.
Par une décision du 12 août 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 août 2019.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants et R. 134-7 et suivants ;
- le code de l'urbanisme ;
- la décision du 13 février 2019 portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
- la décision du 15 juillet 2019 du président du comité de règlement des différends de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 01-38-19.
Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique, qui s'est tenue le 16 septembre 2019, du comité de règlement des différends et des sanctions, en l'absence de M. C., ni présent ni représenté, composé de M. Thierry TUOT, président, Mme Henriette CHAUBON, M. Henri DE LAROSIÈRE DE CHAMPFEU et Mme Hélène VESTUR, membres, en présence de :
M. Emmanuel RODRIGUEZ, directeur juridique adjoint et représentant le directeur général empêché ;
M. David MASLARSKI, rapporteur ;
Le représentant de la société ENEDIS, assisté de Me TRECOURT.
Après avoir entendu :
- le rapport de M. David MASLARSKI, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de Me François TRECOURT pour la société ENEDIS, qui persiste dans ses moyens et conclusions.
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré après que les parties, le rapporteur, le public et les agents des services se sont retirés ;
Sur la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions :
- Aux termes de l'article L. 134-19 du code de l'énergie : « Le comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : / 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité ou de réseaux fermés de distribution d'électricité ; (…) / Ces différends portent sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 111-97, L. 321-11 et L. 321-12, ou des contrats relatifs aux opérations de transport et de stockage géologique de dioxyde de carbone mentionnés à l'article L. 229-49 du code de l'environnement. »
- L'article R.* 423-50 du code de l'urbanisme, relatif à l'instruction des demandes de permis et des déclarations préalables, dispose que : « L'autorité compétente recueille auprès des personnes publiques, services ou commissions intéressés par le projet, les accords, avis ou décisions prévus par les lois ou règlements en vigueur. »
- En l'espèce, M. C. conteste le bien-fondé de l'avis rendu par la société ENEDIS le 1er février 2017 dans le cadre de l'examen de sa demande de permis de construire déposée le 23 décembre 2016 auprès de la commune de L. Il résulte de l'instruction que cet avis a été rendu en application des dispositions précitées de l'article R.* 423-50 du code de l'urbanisme afin d'éclairer l'autorité administrative sur les travaux qui s'avéreraient nécessaires pour procéder au raccordement de la construction projetée au réseau public de distribution d'électricité.
- L'avis en litige, qui a été adressé par le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité à l'autorité administrative dans le seul cadre de l'instruction d'une demande d'autorisation d'urbanisme, dont le refus fait par ailleurs l'objet d'une contestation devant la juridiction administrative, est un acte préparatoire. Il est constant qu'il n'y a pas eu de demande de raccordement présentée par M. C. et, par conséquent, pas de refus d'accès au réseau de la société ENEDIS. Par suite, en l'état du dossier, la demande qu'il a présentée devant le comité de règlement des différends et des sanctions n'est pas relative à un différend portant sur l'accès aux réseaux ou à leur utilisation au sens des dispositions précitées de l'article L. 134-19 du code de l'énergie.
- Il résulte de ce qui précède que la demande de règlement de différend présentée par M. C. ne ressortit pas à la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions de la commission de régulation de l'énergie.
Décide :
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