JORF n°0043 du 19 février 2012

Décision du 9 janvier 2012

Par décision du directeur général de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé en date du 9 janvier 2012 :
Considérant qu'il ressort notamment des dispositions de l'article L. 5122-2 du code de la santé publique que la publicité doit respecter les dispositions de l'autorisation de mise sur le marché et présenter le médicament de façon objective ;
Considérant que les Laboratoires DOLIAGE ont diffusé trois publicités relatives à la spécialité EURONAC 5 %, collyre - aides de visite ;
Considérant que la page 4 de deux des documents titre : « N-acétylcystéine en post LASEK chez l'homme » et présente, sous l'allégation : « une réduction de 50 % du haze cornéen à 1 mois », un graphique comparant le score de haze cornéen avant traitement par N-acétylcystéine, puis un mois après ; que ces résultats sont issus de l'étude de Urgancioglu et coll., étude comparative versus placebo réalisée dans le cadre de la cicatrisation postchirurgicale ;
Considérant que le principe actif d'EURONAC est la N-acétylcystéine, que l'indication validée par l'autorisation de mise sur le marché d'EURONAC est : « favorise la cicatrisation des ulcérations cornéennes d'origine traumatique » et que, en outre, l'étude pivotale du dossier d'AMM avait exclu de l'analyse les lésions de la cornée d'origine chirurgicale considérant que l'objectif de l'étude était d'évaluer l'ulcère cornéen d'origine traumatique ;
Considérant de plus que l'étude de Urgancioglu et coll. précitée présente des faiblesses méthodologiques qui compromettent son interprétation, à savoir : étude ouverte, non randomisée, avec un faible nombre de sujets et sans critère principal d'évaluation ;
Considérant enfin que l'AMM d'EURONAC n'a pas validé une efficacité sur la réduction du haze cornéen ;
Considérant par conséquent que cette présentation ne respecte pas les dispositions de l'AMM et n'est pas objective et que le rappel de l'indication, en bas de page, ne saurait suffire à légitimer cette présentation ;
Considérant que ces documents mettent en avant une propriété pharmacologique relative au contrôle précoce des médiateurs de la cicatrisation, en présentant le taux d'IL1-alpha dans les larmes avant une chirurgie de type LASEK puis en postopératoire, un et cinq jours après un traitement par corticoïdes versus corticoïdes + N-acétylcystéine ;
Considérant d'une part que cette présentation s'appuie sur les résultats de l'étude en post-LASEK précitée, réalisée dans une indication non superposable à l'indication validée par l'AMM et présentant des faiblesses méthodologiques, et, d'autre part, que cette propriété pharmacologique n'est pas validée par l'AMM d'EURONAC ;
Considérant que ces documents présentent une propriété pharmacologique de la N-acétylcystéine en mettant notamment en exergue l'allégation : « La N-acétylcystéine inhibe directement la Matrix Métallo Protéase MMP2 », référencée par la publication de Bogani et coll. ;
Considérant que l'action spécifique sur la MMP2 n'est pas une propriété pharmacologique décrite dans le chapitre 5.1 Propriétés pharmacodynamiques de l'AMM d'EURONAC ;
Considérant que deux documents présentent des résultats issus d'études expérimentales réalisées chez l'animal :
― en page 3 de ces documents, les résultats de l'étude de Said et coll. mettent en avant l'absence d'inflammation au niveau du stroma cornéen et de l'épithélium, huit jours après administration de N-acétylcystéine suite à des brûlures à la soude chez le lapin ;
― en page 5 d'un des documents, les résultats de l'étude de Kubota et coll. mettent en avant l'efficacité d'un traitement préventif par la N-acétylcystéine sur l'étendue de la néovascularisation, six jours après des brûlures à la soude avec destruction limbique chez la souris ;
Considérant que ces résultats mettent en avant des propriétés pharmacologiques non validées par l'AMM d'EURONAC, sous-tendues par des études de pharmacologie animale non extrapolables à l'homme ;
Considérant qu'un document met en exergue, en page 1, sous le titre « Plaies de cornée » les allégations : « la cicatrisation de la cornée et la vitesse de ré-épithélialisation sont essentielles pour réduire le risque d'infection et pour un meilleur pronostic visuel » et « une cicatrisation rapide de la cornée réduit également le risque de taie cornéenne, de haze cornéen, et de survenue d'un astigmatisme irrégulier », en s'appuyant sur l'ouvrage de Brightbill F ; que le document est ensuite axé sur le fait qu'EURONAC favorise une cicatrisation rapide de la cornée ;
Considérant que l'AMM d'EURONAC ne valide pas que ce médicament ait fait la preuve d'une efficacité sur la réduction du risque d'infection, l'amélioration du pronostic visuel, la réduction du risque de taie cornéenne, de haze cornéen et de survenue d'un astigmatisme irrégulier ;
Considérant ainsi que la mise en exergue de ces allégations, référencées par des propos d'auteurs dans un document promotionnel en faveur d'EURONAC, suggère qu'en favorisant la cicatrisation de la cornée EURONAC permet de réduire les risques précités et d'améliorer le pronostic visuel, ce qui n'est pas objectif et ne respecte pas les dispositions de l'AMM de ce médicament ;
Considérant qu'un document titre en page 1 « Traumatismes de la cornée : une symptomatologie dominée par une douleur intense, difficile à soulager », avec pour référence l'ouvrage de J.-L. Bourges intitulé Les Urgences traumatiques oculaires et que la page suivante de ce document met en avant, sous l'allégation : « Plaies de cornée : pour soulager rapidement la douleur », un graphique présentant une comparaison de l'évolution de la douleur en fonction du temps, pour des patients traités par le collyre EURONAC versus le collyre Kératyl ;
Considérant que ces résultats sont issus de l'étude pivotale, multicentrique en double aveugle ayant évalué l'efficacité et la tolérance du collyre EURONAC à 5 % de N-acétylscystéine versus le médicament de référence, le collyre Kératyl ; que le critère principal d'évaluation de cette étude était l'évaluation des propriétés cicatrisantes à l'aide de critères objectifs tels que le pourcentage de cicatrisation complète en fonction du temps et que le critère secondaire était l'évaluation de la tolérance au moyen de signes objectifs tels que l'hyperhémie conjonctivale et subjectifs tels que la douleur ;
Considérant ainsi que la mise en exergue des résultats du seul critère relatif à l'évolution de la douleur en fonction du temps, associée aux allégations précitées, ne constitue pas une présentation objective de cette étude en l'absence de présentation du critère principal d'évaluation et de la méthodologie de l'étude ;
Considérant qu'un second document débute par la même allégation relative à la douleur en cas de traumatisme de la cornée puis présente prioritairement en page 2 ce même graphique, accompagné par les allégations : « EURONAC : soulager rapidement et durablement la douleur » et « Au 3e jour, 70 % des patients sous EURONAC n'ont plus de douleur » ;
Considérant ainsi que la mise en exergue des résultats du critère relatif à l'évolution de la douleur en fonction du temps, associée aux allégations précitées, axe prioritairement la communication sur ce critère alors que le critère principal n'apparaît qu'en page 3 et de façon incomplète (pas de données chiffrées pour étayer la comparaison des vitesses de cicatrisation) et que la méthodologie de l'étude n'est pas présentée ;
Considérant par conséquent que cette présentation de l'étude n'est pas objective ;
Considérant qu'ainsi ces documents sont contraires aux dispositions de l'article L. 5122-2 susmentionné du code de la santé publique,
les publicités susvisées pour la spécialité pharmaceutique EURONAC 5 %, collyre, sont interdites.