La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,
Vu le code de la santé publique, et notamment les articles L. 2151-5 et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;
Vu la décision de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine du 11 juillet 2013 autorisant l'université de Picardie Jules Verne (unité de virologie clinique et fondamentale, centre de biologie humaine, CHU Amiens) à mettre en œuvre un protocole de recherche sur des cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu la décision du 8 septembre 2015 modifiant la décision n° 2013-11 du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionnées à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;
Vu la demande présentée le 31 mars 2016 par l'université de Picardie Jules Verne (unité de virologie clinique et fondamentale, centre de biologie humaine, CHU Amiens) aux fins d'obtenir le renouvellement de son autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 16 septembre 2016 ;
Vu les rapports d'expertise en date du 29 juin et 1er juillet 2016 ;
Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 20 octobre 2016 ;
Considérant qu'une première autorisation a été accordée à cette équipe en 2013 pour une durée de trois ans ; que la demande s'inscrit dans la continuité du protocole précédent ;
Considérant que le projet de recherche utilise la lignée H9 (WA-09) provenant du WiCell Research Institute (Etats-Unis) ; que, déjà présente sur le territoire national, cette lignée a été importée par Marc Peschanski (INSERM UMR 861) en vertu d'une autorisation délivrée le 12 mars 2010 par décision de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine après avis favorable de son conseil d'orientation ;
Considérant que, à l'occasion de la demande d'autorisation d'importation déposée par Marc Peschanski, le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et de celles relatives à l'information et au recueil du consentement des couples a été vérifié et la demande d'autorisation présente de nouveau l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des conditions législatives et réglementaires ; que le conseil d'orientation souligne que l'ensemble de ces documents sont de nouveau fournis en annexe de la présente demande ;
Considérant que l'infection par le virus de l'hépatite C (VHC) est un problème de santé publique par le nombre de sujets infectés et sa gravité dans la mesure où elle expose le patient au risque de développement d'un cancer du foie ; que, même si des molécules antivirales récemment mises sur le marché ont révolutionné l'évolution clinique et permettent d'obtenir la guérison des patients, il n'en reste pas moins que des résistances existent chez 10 % d'entre eux ; que ces résistances sont mal comprises et l'accès à ces thérapies est restreint ;
Considérant que le développement d'un vaccin serait donc précieux et il est donc essentiel - à la fois pour décrypter les mécanismes développés par le virus, mais aussi pour identifier de nouvelles cibles thérapeutiques - de disposer d'un système expérimental d'exploration des mécanismes d'infection et de réplication du virus, et des caractéristiques de l'hôte qui influent sur cette infection ;
Considérant que les seuls systèmes expérimentaux existants sont très artificiels en ce qu'ils utilisent une lignée de cancer du foie, non représentative des hépatocytes primaires, et une souche virale adaptée aux cellules en culture, et non représentative des isolats viraux dérivés des patients ; qu'il est en effet actuellement impossible d'infecter les hépatocytes humains disponibles et maintenus en culture avec des isolats viraux dérivés des patients, alors que ces sérums sont infectieux pour le chimpanzé ; que, si des hépatocytes primaires et, plus récemment, des hépatocytes-like dérivés de cellules souches pluripotentes ont été utilisés comme modèle, c'est en général avec la souche virale adaptée aux cellules en culture ; que l'étude des isolats issus des patients, très variés, est indispensable pour comprendre la pathogenèse de la maladie, la résistance aux traitements et définir de nouvelles cibles thérapeutiques ;
Considérant que les deux questions que l'équipe se propose de résoudre, obtention d'hépatocytes matures (seuls infectables par le HCV) et définition d'une stratégie d'infection par des HCV isolés de patients, apparaissent donc particulièrement pertinentes dans un objectif de santé publique ;
Considérant que la première étape du projet de recherche, en cours, consiste à mettre au point le protocole de différenciation efficace et fiable des cellules H9 en cellules hépatocytaires ; qu'il apparaît tout à fait indispensable pour une infection virale résultant du VHC que les hépatocytes soient matures mais que l'obtention d'hépatocytes matures est particulièrement difficile (il s'agit d'une cellule très complexe sur le plan des systèmes enzymatiques qui sous-tendent sa fonction) ; que cette difficulté est rencontrée par toutes les équipes travaillant sur ces protocoles : obtenir des progéniteurs hépatiques immatures ou des hépatocytes fœtaux est relativement aisé, mais poursuivre leur maturation terminale en hépatocytes adultes fonctionnels est difficile ; qu'il est donc essentiel d'utiliser pour cette mise au point une lignée de référence, la lignée de cellules souches embryonnaires humaines H9, utilisée par toutes les équipes développant un protocole sur les hépatocytes issus de cellules souches pluripotentes, permettant ainsi des collaborations précieuses ; que, dans une seconde étape, l'équipe souhaite appliquer ce protocole de différenciation à des lignées de cellules souches pluripotentes induites (lignées dites iPS), en particulier provenant de patients ayant une infection chronique à VHC, et pour lesquels des sérums infectieux sont disponibles ;
Considérant que les travaux réalisés depuis 2013 dans le cadre de la première autorisation délivrée par l'Agence de la biomédecine ont permis de mettre en place un protocole de différenciation en cellules hépatocyte-like opérationnel à partir de la lignée H9 ; que les essais sur des cellules iPS dérivées de deux patients se sont heurtés à des difficultés (mort cellulaire importante), confirmant ainsi l'importance du protocole de référence établi avec H9 ; que l'équipe a parallèlement mis au point un système d'organoïdes en trois dimensions, permettant de reconstituer une architecture plus proche de l'organe physiologique ;
Considérant que la finalité médicale du projet et l'objectif thérapeutique ne font aucun doute ; qu'il s'agit de mettre au point un système cellulaire robuste de réplication de virus issus de patients infectés par le virus de l'hépatite C afin de comprendre les différentes étapes du cycle viral dans l'environnement « naturel » du virus ; que ce dernier apportera des informations précieuses sur le comportement du virus et en particulier les facteurs de permissivité cellulaires ; que l'atout principal de cette équipe est de travailler avec des isolats primaires du VHC, qui seuls permettront de faire avancer significativement nos connaissances dans la perspective d'une amélioration des traitements et peut-être leur « personnalisation » s'il s'avère possible ultérieurement d'appliquer ce protocole à des cellules issues de patients infectés ;
Considérant que, dans le cadre de la demande de renouvellement, l'équipe va articuler ses travaux autour de différentes étapes qui consistent à (1) optimiser l'obtention d'hépatocytes matures ; (2) tester l'infectabilité des cellules par différents isolats viraux, et ensuite la production virale et la diffusion du virus aux cellules voisines ; que ces étapes peuvent être testées indépendamment ; que ces techniques d'analyse de la permissivité virale sont parfaitement maîtrisées par l'équipe ; que les expériences seront menées parallèlement à l'infection par la souche JFH1 adaptée aux cultures ; que l'originalité du projet est qu'il explore une situation beaucoup plus proche d'une infection naturelle que celle utilisant des souches virales adaptées au laboratoire ;
Considérant que, en l'état des connaissances scientifiques, elle ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires humaines ; que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres types de cellules souches ; qu'il n'existe pas à ce jour de bons modèles de l'infection par le virus de l'hépatite C ; qu'il n'existe pas d'alternative expérimentale car il est nécessaire d'obtenir des hépatocytes matures ; que, à ce stade du projet de l'équipe, l'utilisation de cellules souches embryonnaires humaines apparaît indispensable pour assurer le développement d'un protocole efficace et reproductible de maturation terminale des hépatocytes ;
Considérant que l'adaptation ultérieure de ce protocole à des lignées iPS constitue une suite logique du projet actuel ; que, toutefois, l'utilisation initiale et exclusive de cellules iPS n'est pas envisageable à ce stade du projet ; que les conséquences des anomalies génétiques et des modifications épigénétiques (multiples et différentes pour chaque lignée) créées par le processus de reprogrammation lui-même et le processus de différenciation des cellules iPS sont encore mal appréciées ; qu'une des plus grandes difficultés actuelles est l'extrême hétérogénéité des lignées d'iPS, puisqu'il s'agit de dériver une lignée par patient, des conditions de culture et des cellules somatiques d'origine (induisant une « mémoire épigénétique » persistante) ; que les CSEh sont, par comparaison, beaucoup plus homogènes, toutes issues de la masse interne du blastocyste, et spontanément pluripotentes, sans nécessité d'induire des modifications génétiques ou épigénétiques, pour leur conférer cette pluripotence ;
Considérant que la communauté scientifique et médicale s'accorde sur la grande complexité de ce processus de reprogrammation, dont nous déchiffrons à peine les mécanismes, qui ne sont par ailleurs pas encore maîtrisés ; que beaucoup d'équipes ont pu faire l'expérience de difficultés rencontrées dans la transposition aux iPS des protocoles de différenciation développés avec les CSEh ; qu'il est donc indispensable d'assurer la preuve de concept des hypothèses émises avec des CSEh, et de toujours se référer aux CSEh dans le travail avec de nouvelles iPS ;
Considérant en conséquence que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues dans le respect des principes fondamentaux prévus aux articles 16 à 16-8 du code civil, et avec le consentement préalable du couple géniteur, et sans qu'aucun paiement, quelle qu'en soit la forme, ne leur ait été alloué ;
Considérant que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ; que l'équipe est compétente et possède toute la légitimité nécessaire pour mener ce protocole car elle est reconnue sur le plan national et international dans le domaine des virus de l'hépatite ; que la structure est pérenne et le financement est assuré ; que deux personnes travailleront sur ce projet à 50 % de leur temps de recherche dont un ingénieur et un MCU-PH, ainsi qu'un technicien à 20 % ; que l'équipe possède une solide expérience dans la caractérisation et la purification des virus VHC, et a constitué une sérothèque qui garantit la faisabilité des étapes d'infection des cellules dérivées de la lignée H9 ;
Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée ; que cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des embryons et des cellules embryonnaires ; que les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrits et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine ; que le laboratoire dispose des équipements nécessaires à la mise en œuvre de ce protocole de recherche dans des conditions optimales,
Décide :