JORF n°0260 du 7 novembre 2021

Décision du 3 mai 2021

La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,

Vu la loi n° 2013-715 du 6 août 2013 tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires ;

Vu le code de la santé publique, notamment les articles L. 2151-5, R. 2141-17 à R. 2141-23 et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;

Vu la décision du 8 septembre 2015 modifiant la décision n° 2013-11 du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionnées à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;

Vu la demande présentée le 30 septembre 2020 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (CECS I-Stem Inserm UMR 861, Equipe Maladie du Motoneurone, Evry) aux fins d'obtenir le renouvellement de son autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;

Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;

Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 11 décembre 2020 ;

Vu les rapports d'expertise en date du 12 et 25 février 2021 ;

Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 25 mars 2021 ;

L'objectif général du projet est d'utiliser des cellules souches embryonnaires en vue de modéliser les évènements moléculaires et cellulaires à l'origine de la DM1 ;

La myotonie dystrophique de type 1 (DM1, dite maladie de Steinert) est la plus fréquente des maladies neuromusculaires transmises sur un mode autosomique dominant. Chaque enfant dont l'un des parents est atteint a ainsi une probabilité de 50 % d'être porteur de l'anomalie. Cette maladie héréditaire est due à une mutation dans le gène DMPK, qui code une protéine kinase. La mutation entraîne la répétition (× 50 à 2000) d'un triplet CTG (cytosine, thymidine, guanine) dans la région transcrite mais non traduite du gène codant la myotonine ou DMPK. Cette répétition est responsable de la formation de complexes entre des ARN et des protéines, qui induisent de multiples altérations : (1) une perturbation de l'expression de gènes adjacents ; (2) une interaction aberrante entre la protéine anormale et des protéines se liant à l'ARN ; et (3) l'interférence des ARN aberrants de DMPK avec des ARN spécifiques d'autres tissus, aboutissant à des épissages anormaux (l'épissage d'un ARN primaire consiste à éliminer certaines séquences pour aboutir à un ARN mature fonctionnel, capable d'être traduit en une protéine) ;

Cette diversité des actions indirectes explique l'atteinte clinique multisystémique (touchant plusieurs organes ou systèmes de l'organisme) et très variable selon les patients associant, à des degrés divers, un déficit musculaire (dystrophie musculaire, myotonie ou lenteur anormale à la décontraction musculaire) ; des troubles du rythme ou de conduction cardiaque (les atteintes cardiaques sont observées chez plus de 80 % des patients DM1 et consistent en une cardiomyopathie dilatée ainsi que des anomalies de conduction cardiaque pouvant entraîner la mort subite du patient) ; une atteinte oculaire (cataracte), une atteinte endocrinienne (diabète) et du système nerveux central (dégénérescence fibrillaire par agrégation de la protéine tau) ;

Le projet de recherche utilise les lignées de cellules souches embryonnaires humaines SA-001, provenant de Cellartis AB (Suède), WA-09, provenant du WiCell Research Institute (Etats-Unis), et SZ-DM6 et SZ-DM9 provenant du Shaare Zedek Medical Center (Israël). Elles sont déjà présentes sur le territoire national. Elles ont été importées par Marc Peschanski (INSERM) dans le cadre de la demande initiale de ce protocole de recherche, autorisé le 16 février 2005 par arrêté des ministres chargés de la santé et de la recherche en application du dispositif transitoire mis en place par la loi du 6 août 2004 (article 37), par Anne-Lise Bennaceur (INSERM) dans le cadre d'un protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires autorisé par la directrice générale de l'Agence de la biomédecine le 20 septembre 2006 et par Cécile Martinat et Sandrine Baghdoyan dans le cadre d'une décision d'autorisation d'importation du 7 décembre 2018 en application des dispositions de l'article L. 2151-6 du code de la santé publique ;

A l'occasion de l'examen des demandes d'autorisation d'importation de ces lignées de cellules souches embryonnaires humaines, le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et de celles relatives à l'information et au recueil du consentement des couples a été vérifié et la demande de renouvellement d'autorisation de recherche présente de nouveau l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des dispositions législatives et réglementaires relatives à l'importation de telles cellules. Le conseil d'orientation souligne d'ailleurs dans son avis que l'ensemble de ces documents sont de nouveau fournis en annexe ;

Une première autorisation a été accordée à cette équipe en 2005 pour une durée de cinq ans et a été renouvelée par décisions de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine en 2010 et 2015. La présente demande s'inscrit dans la continuité du protocole précédent ;

Afin de mieux comprendre la physiopathologie de la DM1 et de promouvoir de nouvelles thérapeutiques, le projet de l'équipe consiste, depuis la première autorisation délivrée en 2005, à développer un modèle cellulaire à partir de cellules souches embryonnaires humaines (CSEh) dérivées d'embryons porteurs de la mutation ou de cellules normales dans lesquelles le transgène est introduit. Ces cellules souches embryonnaires humaines ont été différenciées en cellules mésenchymateuses et neuronales. Grâce à ces modèles cellulaires, l'équipe a identifié plusieurs gènes dérégulés impliqués dans le développement de la DM1. Il s'agit notamment de gènes intervenant dans la régulation du récepteur de l'insuline, ou dans la connexion entre motoneurones et cibles musculaires (jonction neuromusculaire) ;

Ces modèles cellulaires ont conduit l'équipe à des résultats majeurs publiés dans des revues internationales de très haut niveau : identification de biomarqueurs, mise en évidence d'anomalies des microARN (petits ARN non codants qui interfèrent avec d'autres ARN et bloquent leur traduction en protéines) et approche thérapeutique par criblage de composés thérapeutiques à la recherche de gènes modulateurs susceptibles de restaurer une fonction normale ;

Cette approche a permis notamment d'identifier la metformine, une molécule déjà prescrite comme antidiabétique, qui induit une réversion de certains phénotypes associés à la DM1. Ce résultat a conduit à la mise en place d'un essai clinique de phase II en collaboration avec l'hôpital Henri Mondor (AP-HP, Créteil), impliquant 40 patients atteints de DM1 ;

Les premiers résultats de cet essai ont été publiés en juillet 2018 et ont montré un effet significatif d'un traitement par la metformine : les patients traités ont gagné une distance moyenne de marche de près de 33 mètres dans le test dit de « 6 minutes de marche », contre 3 mètres pour les patients traités par placebo ;

Le conseil d'orientation souligne dans son avis l'excellence du projet, très vaste, qui avance très régulièrement depuis le début de son autorisation, et est mené avec beaucoup de rigueur. La double approche, mécanistique (de compréhension) et thérapeutique apparaît particulièrement fructueuse au regard des nombreuses publications, du brevet déposé et de l'approche thérapeutique par criblage de molécules ;

Dans le cadre de ce bilan extrêmement positif, l'équipe souhaite poursuivre ses recherches en se focalisant sur la modélisation des mécanismes pathologiques d'une part, et la recherche d'approches thérapeutiques (criblage de molécules) d'autre part ;

L'objectif général de la demande de renouvellement s'oriente autour de deux grands axes :

- la caractérisation de nouveaux mécanismes physiopathologiques associés à la DM1. Dans cet objectif, l'équipe a mis au point un protocole de différenciation des CSEh dans les deux sous-types principaux de neurones moteurs (neurones moteurs spinaux et craniaux) principalement affectés dans le cadre de maladies neuromusculaires. L'équipe étudiera l'impact de la mutation DM1 dans ces différents sous-types neuronaux, notamment pour ce qui concerne (i) l'expression différentielle de gènes, (ii) la présence d'agrégats d'ARN mutants au niveau nucléaire, (iii) la présence d'une pousse neuritique normale ou anormale, et (iv) le fonctionnement de la jonction neuro-musculaire par co-cultures de motoneurones issus des cellules souches embryonnaires humaines avec des cultures primaires de myotubes porteurs ou non de la mutation DM1 ;

- l'identification de composés thérapeutiques. En plus de la poursuite d'un essai clinique de phase III ayant démarré en Italie impliquant la metformine, l'équipe poursuivra la recherche de composés thérapeutiques par criblage de molécules ayant un effet direct sur les anomalies d'épissage associées à la DM1, ainsi que sur les changements induits par la mutation au sein des progéniteurs mésenchymateux ;

La finalité médicale du projet et l'objectif thérapeutique sont évidents. Les aspects techniques sont parfaitement maîtrisés. Toutes les garanties sont réunies pour mener à bien le projet. Le projet porté par l'équipe de C. Martinat est très vaste, mais il progresse très régulièrement depuis sa première autorisation en 2005 et il est mené avec beaucoup de rigueur. L'équipe est très compétitive, et très bien évaluée par les instances. La pertinence du projet ne fait donc aucun doute ;

Le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres types de cellules souches. S'agissant des cellules souches embryonnaires murines et primates, il n'est pas envisageable d'utiliser des cellules d'origine animale alors que l'objectif général du projet est de développer un produit de thérapie cellulaire en vue d'une utilisation en clinique chez l'Homme ;

Le processus de reprogrammation des cellules souches pluripotentes induites (iPS) entraîne, par lui-même, des modifications génétiques qui distinguent CSEh et iPS. De nombreuses anomalies génétiques sont retrouvées dans les cellules iPS et la reprogrammation peut en elle-même perturber l'établissement d'un modèle cellulaire. Dans le cas de la DM1, la reprogrammation des cellules des patients en iPS aggrave l'expansion anormale du nombre de répétitions et questionne ainsi la validité du modèle iPS des DM1 ;

La communauté scientifique et médicale s'accorde sur le fait que pour les prochaines années, les CSEh apparaissent en l'état actuel des connaissances plus sûres et saines dans ce type d'application, ce qui justifie le choix des CSEh. Il n'existe pas aujourd'hui de produit cellulaire alternatif ayant une efficacité comparable, et il est donc justifié que cette équipe poursuive son programme avec des CSEh, dans l'intérêt des patients, dont le conseil d'orientation rappelle l'extrême gravité de leur maladie ;

Le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques d'autre part. Il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues conformément aux dispositions législatives et réglementaires applicables ;

Les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière. L'équipe est compétente et possède toute la légitimité nécessaire pour mener ce protocole. La demande est présentée par Cécile Martinat, directrice de recherche INSERM, qui dirige une des quatre équipes du laboratoire iStem (créé par Marc Peschanski), et Sandrine Baghdoyan, ingénieure de recherche. L'équipe dédiée au projet comprend 9 personnes, dont deux ingénieurs de recherche titulaires impliqués au moins à 50 %. Le projet a initialement démarré en 2005, l'équipe dispose donc d'une grande expérience des techniques utilisées dans ce programme. Le nombre important de publications depuis le dernier renouvellement montre l'excellence de cette équipe et sa reconnaissance au niveau international ;

La pérennité de l'unité ne fait aucun doute, et le financement de ce projet (estimé à 180 000 euros par an) est assuré par les fonds propres du laboratoire iStem, un financement ANR Labex et le projet européen Recognition ;

Enfin, les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée. Cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des cellules embryonnaires. Les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrites et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine dans son rapport et à l'occasion de sa visite sur place le 10 décembre 2020. Le laboratoire dispose des équipements nécessaires à la mise en œuvre de ce protocole de recherche dans des conditions optimales,

Décide :

Article 1

Ce texte est une simplification générée par une IA.
Il n'a pas de valeur légale et peut contenir des erreurs.

Autorisation de recherche sur les cellules souches embryonnaires pour la dystrophie myotonique de type 1

Résumé L'Inserm peut faire des recherches sur des cellules souches pour comprendre une maladie génétique.

L'Institut national de la santé et de la recherche médicale (CECS I-Stem Inserm UMR 861, Equipe Maladie du Motoneurone, Evry) est autorisé à mettre en œuvre, dans les conditions décrites dans le dossier de demande d'autorisation, le protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ayant pour finalité l'étude de la modélisation de la dystrophie myotonique de type 1 à l'aide de cellules souches embryonnaires humaines. Ces recherches sont placées sous la responsabilité de Mmes Cécile Martinat et Sandrine Baghdoyan.

Article 2

Ce texte est une simplification générée par une IA.
Il n'a pas de valeur légale et peut contenir des erreurs.

Durée et suspension de l'autorisation de l'Agence de la biomédecine

Résumé L'autorisation peut être suspendue ou annulée si les règles ne sont pas suivies.

La présente autorisation est accordée pour une durée de cinq ans. Elle peut être suspendue à tout moment pour une durée maximale de trois mois, en cas de violation des dispositions législatives ou réglementaires, par le directeur général de l'Agence de la biomédecine. L'autorisation peut également être retirée, selon les modalités prévues par les dispositions du code de la santé publique susvisées.

Article 3

Ce texte est une simplification générée par une IA.
Il n'a pas de valeur légale et peut contenir des erreurs.

Modification du dossier de demande d'autorisation

Résumé Si vous modifiez votre dossier, dites-le au directeur général de l'Agence de la biomédecine.

Toute modification des éléments figurant dans le dossier de demande d'autorisation doit être portée à la connaissance du directeur général de l'Agence de la biomédecine.

Article 4

Ce texte est une simplification générée par une IA.
Il n'a pas de valeur légale et peut contenir des erreurs.

Exécution de la décision par le directeur général adjoint de l'Agence de la biomédecine

Résumé Le directeur général adjoint de l'Agence de la biomédecine doit appliquer cette décision et la publier.

Le directeur général adjoint chargé des ressources de l'Agence de la biomédecine est chargé de l'exécution de la présente décision, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait le 3 mai 2021.

E. Cortot-Boucher