La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,
Vu le code de la santé publique, et notamment les articles L. 2151-5, R. 2141-17 à R. 2141-23, et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;
Vu la loi n° 2013-715 du 6 août 2013 tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires ;
Vu la décision du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionné à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;
Vu la demande présentée le 31 mars 2015 par le laboratoire de biologie de la reproduction du Centre hospitalier universitaire de Dijon aux fins d'obtenir une autorisation de protocole de recherche sur l'embryon ;
Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 20 mai 2016 ;
Vu les rapports d'expertise en date du 18 et 23 mai 2016 ;
Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 9 juin 2016 ;
Considérant que le projet envisage d'étudier la possibilité que les techniques d'assistance médicale à la procréation (AMP) aient un retentissement sur la reprogrammation épigénétique qui a lieu au cours du développement embryonnaire précoce ; qu'au cours de cette période, des remaniements épigénétiques majeurs touchent la méthylation de l'ADN (contrôlant l'expression de certains gènes), la régulation des séquences transposables (séquences mobiles endogènes disséminés dans le génome qui modulent l'organisation et l'expression des gènes) et surtout leur inactivité ou encore l'empreinte parentale (marquage épigénétique différentiel des génomes du spermatozoïde et de l'ovocyte) ;
Considérant que plusieurs arguments indiquent que l'assistance médicale à la procréation modifie ces remaniements avec pour conséquence un possible effet délétère non seulement sur l'implantation et le développement de l'enfant, mais également sur sa santé future : le profil épigénétique est en effet différent chez l'enfant né après AMP ou suite à une grossesse naturelle, ce qui peut entraîner une susceptibilité accrue à certaines maladies, en particulier métaboliques, d'une part, et la proportion plus importante des patients atteints de « maladies de l'empreinte parentale », comme le syndrome de Beckwith-Widemann, nés suite à une prise en charge dans le cadre d'une procédure d'AMP d'autre part ; que cette variabilité épigénétique après AMP a également été décrite à de nombreuses reprises dans les modèles animaux (bovin et murin) ; qu'il apparaît donc essentiel, alors que les techniques le permettent désormais, d'aborder d'une manière expérimentale cette relation entre modifications épigénétiques et développement embryonnaire après AMP ;
Considérant que le protocole de recherche est défini autour de trois objectifs : connaître l'impact de la composition du milieu de culture, connaître la variabilité épigénétique intercellulaire au sein d'un même embryon, et relier l'intégrité épigénétique et la qualité embryonnaire ; que la démarche de l'équipe sera fondée sur l'analyse conjointe du transcriptome (séquençage de l'ARN) et du méthylome (analyse des zones de méthylation de l'ADN) à l'échelle globale du génome afin de déterminer non seulement les modifications épigénétiques mais aussi leurs conséquences sur l'expression des gènes ; que les analyses seront réalisées sur l'embryon in toto et sur la cellule unique, car il est important de déterminer le degré de variabilité d'une cellule à une autre dans l'embryon précoce ;
Considérant que les données issues de ce programme de recherche pourraient se révéler déterminantes pour la prise en charge des tentatives de fécondation in vitro, permettant éventuellement de définir des biomarqueurs prédictifs, d'une part, et pour la mise en évidence d'un lien éventuel entre la morphologie de l'embryon (actuellement le seul critère de transfert) et sa capacité de développement d'autre part ; que la possibilité exceptionnelle d'analyser des embryons d'une cohorte associée à une pathologie liée à l'empreinte parentale pourraient également, en fonction des résultats, conduire à modifier totalement la prise en charge ultérieure des couples concernés dans le cadre d'une AMP ;
Qu'il s'agit en conséquence d'un protocole de recherche s'inscrivant dans une finalité médicale ;
Considérant qu'en l'état des connaissances scientifiques, elle ne peut être menée sans recourir à des embryons humains ; que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, le développement embryonnaire précoce de la souris et les modifications épigénétiques qui l'accompagnent étant très différentes ; que les embryons utilisés dans le cadre de ce protocole proviennent du laboratoire de biologie de reproduction du centre hospitalier universitaire de Dijon ;
Considérant que les embryons utilisés seront soit des embryons surnuméraires conçus dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation, dépourvus de projet parental et donnés à la recherche en application des dispositions de l'article L. 2141-4 du code de la santé publique, soit des embryons non susceptibles d'être transférés ou conservés en raison d'un problème affectant la qualité embryonnaire et pouvant être donnés à la recherche en application de l'article L. 2141-3 du même code ;
Considérant en conséquence que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines ; que ces embryons ont été conçus in vitro dans le cadre d'une assistance médicale à la procréation ; que les embryons utilisés dans le cadre de ce protocole ne font plus l'objet d'un projet parental ; que le consentement des couples sera recueilli conformément aux dispositions des articles L. 2141-1 et suivants et L. 2151-1 et suivants du code de la santé publique et selon les modèles-types de consentement rédigés par l'Agence de la biomédecine et sans qu'aucun paiement, quelle qu'en soit la forme, ne leur ait été alloué ;
Considérant que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ; Patricia Fauque est responsable du laboratoire de biologie de la reproduction du CHU de Dijon et assure la codirection d'un groupe de recherche au sein de l'équipe Génétique des anomalies du développement de l'université de Bourgogne ; qu'elle a une expérience reconnue en biologie de la reproduction, notamment en lien avec l'épigénétique ; qu'elle a récemment été formée aux techniques d'étude transcriptomique à haut débit et aux méthodes hautement résolutives de cartographie de l'ADN sur cellule unique dans l'équipe du Professeur Tang en Chine, qui est un spécialiste des analyses épigénétiques et transcriptomiques des cellules embryonnaires ; qu'outre Patricia Fauque et un biologiste du laboratoire de biologie de la reproduction du centre hospitalier universitaire de Dijon, le projet de recherche sera réalisé par un ingénieur de recherches et un étudiant de thèse ;
Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée ; que cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des embryons et des cellules embryonnaires,
Décide :