JORF n°0302 du 29 décembre 2013
Délibération n° 2013-273 du 26 septembre 2013
La Commission nationale de l'informatique et des libertés,
Saisie par le ministère de l'intérieur d'une demande d'avis concernant un projet de décret portant modification du décret n° 2012-652 du 4 mai 2012 relatif au traitement d'antécédents judiciaires ;
Vu la convention n° 108 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel ;
Vu la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement de données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;
Vu le code de procédure pénale, notamment ses articles 230-6 à 230-11 et R. 40-23 à R. 40-34 ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment ses articles 26-II et 30 ;
Vu le décret n° 2001-583 du 5 juillet 2001 pris pour l'application des dispositions du troisième alinéa de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés et portant création du système de traitement des infractions constatées ;
Vu le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 modifié pris pour l'application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;
Vu le décret n° 2006-1411 du 20 novembre 2006 portant création du système judicaire de documentation et d'exploitation dénommé « JUDEX » ;
Vu le décret n° 2012-652 du 4 mai 2012 relatif au traitement d'antécédents judiciaires ;
Après avoir entendu M. Jean-Marie COTTERET, commissaire, en son rapport et M. Jean-Alexandre SILVY, commissaire du Gouvernement, en ses observations,
Emet l'avis suivant :
La commission a été saisie par le ministère de l'intérieur d'une demande d'avis concernant un projet de décret portant modification du décret n° 2012-652 du 4 mai 2012 relatif au traitement d'antécédents judiciaires (TAJ).
Aux termes de l'article 2 du décret du 4 mai 2012, les décrets susvisés du 5 juillet 2001 portant création du STIC et du 20 novembre 2006 portant création de JUDEX seront abrogés au 31 décembre 2013. La modification envisagée porte sur le report de la date de suppression du système de traitement des infractions constatées (STIC) de la police nationale au 31 décembre 2015. A l'occasion du contrôle des fichiers d'antécédents du ministère de l'intérieur, dont les conclusions de la commission ont été rendues publiques en juin 2013, le ministère de l'intérieur avait en effet informé la commission qu'il envisageait de reporter le terme du STIC à une échéance ultérieure.
La commission relève que la rédaction des dispositions du projet de décret permettra de reporter la date de suppression du STIC, mais également de celle du système judicaire de documentation et d'exploitation (JUDEX) de la gendarmerie nationale. Toutefois, elle prend acte que la modification envisagée ne s'appliquera en pratique qu'au STIC. En effet, la reprise des données du traitement JUDEX devrait être achevée au 31 décembre 2013 et ce traitement pourra par conséquent être supprimé à cette date. La commission s'interroge dès lors sur la nécessité de prolonger juridiquement l'existence de ces deux traitements si seul le STIC est en pratique concerné.
A titre général, la commission prend acte que l'accès en consultation du STIC par les agents de la police nationale, dans le cadre de leurs enquêtes, va être supprimé, ces recherches se faisant désormais exclusivement dans le TAJ. Ainsi, le report de la date de suppression du STIC se fera uniquement au bénéfice des services de la police nationale gestionnaires du traitement, afin de remédier à trois difficultés opérationnelles et techniques qui, pour le ministère de l'intérieur, justifient le maintien de l'existence du STIC jusqu'en 2015.
La première difficulté tient à l'alimentation du TAJ. En effet, dans le futur système d'information de la police nationale destiné à l'investigation (NS2I), il est prévu à terme que les traitements de rédaction des procédures de la police nationale (LRPPN, anciennement dénommé ARDOISE) et de la gendarmerie nationale (LRPGN, anciennement dénommé ICARE), créés par les décrets n°s 2011-110 et 2011-111 du 27 janvier 2011 pris après avis de la CNIL, alimentent le TAJ par une reprise directe et automatique des données renseignées par l'enquêteur.
La commission a déjà eu l'occasion de se prononcer sur ces modalités de transmission d'informations entre LRPPN et le TAJ, notamment dans ses délibérations n° 2012-365 du 11 octobre 2012 (relative au traitement LRPPN) et n° 2011-204 du 7 juillet 2011 (relative au TAJ).
Or, le ministère précise que le déploiement de la nouvelle version de LRPPN, qui permettra d'alimenter automatiquement le TAJ, ne sera pas complète avant l'été 2014. Par conséquent, il apparaît nécessaire de conserver le système actuel d'alimentation du STIC : les informations recueillies par les enquêteurs continueront de faire l'objet d'un traitement manuel dans l'application locale « faits constatés et élucidés » (STIC-FCE) par des opérateurs de saisie affectés dans les services territoriaux de la police nationale, ces données étant ensuite transmises à la base nationale.
La deuxième difficulté tient à la mise à jour du TAJ. En effet, le déploiement incomplet de la version connectée de LRPPN empêche également une mise à jour automatique du TAJ.
Actuellement, les services régionaux de documentation criminelle (SRDC), dont l'action est coordonnée par le service central de documentation criminelle (SCDC), sont chargés de la gestion du STIC ; ils assurent une mise à jour manuelle du STIC, effectuent un contrôle de la pertinence des données traitées dans les fichiers d'antécédents et, si besoin, complètent ou corrigent les informations initialement saisies par les policiers ou les gendarmes.
Il existe actuellement un stock de procédures qu'il convient de contrôler, et le fait de conserver le STIC permettra aux SRDC de poursuivre leur mise à jour manuelle de ce traitement. Or, le ministère estime le temps de traitement de ces mises à jour à deux ans, ce qui nécessite dès lors le report de la date de suppression du STIC.
Enfin, le ministère fait savoir que l'outil statistique inclus dans le NS2I et relié au TAJ n'est annoncé que pour 2015. Par conséquent, le STIC-FCE constitue le seul outil disponible pour l'établissement de statistiques institutionnelles.
La commission prend acte de ces nécessités et de la modification de la date de suppression du traitement STIC qu'elles impliquent. Elle considère cependant que ce report devrait être mis à profit par les ministères de l'intérieur et de la justice pour mieux tenir compte des recommandations qu'elle a formulées en juin 2013 dans ses conclusions du contrôle des fichiers d'antécédents du ministère de l'intérieur, tout particulièrement concernant l'exactitude et la mise à jour des données d'antécédents.
La présidente,
I. Falque-Pierrotin