JORF n°0159 du 11 juillet 2013

Délibération du 27 juin 2013

Participaient à la séance : Philippe de LADOUCETTE, président, Olivier CHALLAN BELVAL, Hélène GASSIN et Jean-Pierre SOTURA, commissaires.

La présente délibération est prise en application des dispositions de l'article L. 134-2 du code de l'énergie. Elle a pour objet de définir les modalités de mise en œuvre de la décision de la Commission européenne modifiant l'annexe I du règlement (CE) n° 715/2009 (1) portant sur les procédures de gestion de la congestion (ci-après Annexe CMP ― Congestion Management Procedures).

  1. Contexte

La décision de la Commission européenne sur l'Annexe CMP a été publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 28 août 2012 et est entrée en vigueur le 17 septembre 2012. L'Annexe CMP introduit quatre mécanismes ayant pour objectif d'éviter l'apparition de situations de congestion contractuelle, c'est-à-dire des situations où des utilisateurs n'ont plus la possibilité d'obtenir des capacités de transport alors que celles-ci sont disponibles physiquement. Le mécanisme use-it-or lose-it (UIOLI) de capacités de long terme, le mécanisme de restitution de capacités et le système de surréservation et de rachat de capacités doivent être mis en œuvre à partir du 1er octobre 2013. Le mécanisme use-it-or-lose-it (UIOLI) de capacités fermes à un jour doit être mis en œuvre à partir du 1er juillet 2016 sur la base d'une évaluation de la congestion réalisée par l'Agence de coopération des régulateurs de l'énergie (ACER).
L'Annexe CMP a pour objectif de résoudre les cas de congestion contractuelle par la restitution de capacités non utilisées, afin qu'elles soient proposées à la commercialisation dans le cadre des processus usuels d'attribution des capacités, notamment par enchères dans les conditions prévues par le code de réseau sur les règles d'attribution des capacités de transport (code de réseau CAM ― Capacity Allocation Mechanisms) (2). Le texte reconnaît, en revanche, l'inefficacité des mécanismes de gestion de la congestion lors de situations de congestion physique, c'est-à-dire des situations où les flux physiques sont limités par la capacité technique de manière chronique.
L'Annexe CMP prévoit que les procédures de gestion de la congestion s'appliquent aux points d'interconnexion physiques ou virtuels entre les systèmes entrée-sortie adjacents au sein de l'Union européenne, l'application aux points d'interconnexion avec les pays tiers étant soumise à l'appréciation de l'autorité de régulation. Sur les réseaux de GRTgaz et TIGF, les points concernés par ces mesures sont Taisnières H et B (France/Belgique), Obergailbach (France/Allemagne), liaison Nord-Sud, point d'interconnexion réseau (PIR) Midi, Larrau et Biriatou (France/Espagne). L'application aux points Oltingue (France/Suisse), Dunkerque (France/Norvège) et Jura (France/Suisse) est soumise à la décision de la CRE.
S'appuyant sur les discussions menées en concertation gaz et sur la proposition commune de GRTgaz et TIGF, les modalités envisagées de mise en œuvre de l'Annexe CMP ont fait l'objet d'une consultation publique menée par la CRE du 4 au 23 avril 2013. Vingt contributions, dont une confidentielle, ont été reçues : onze de la part d'expéditeurs, trois de la part d'associations, trois de la part de gestionnaires de réseau de transport (GRT), deux de la part de gestionnaires d'infrastructures et une réponse de la Bundesnetzagentur, autorité de régulation allemande.
Outre les résultats de la consultation publique, la présente délibération prend en compte les travaux de coordination menés avec les autorités de régulation des pays voisins de la France, dont la Comisión Nacional de Energía (Espagne), dans le cadre de l'initiative régionale Sud pour le gaz, et, de manière bilatérale, la Bundesnetzagentur (Allemagne) et la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (Belgique).

  1. Mécanisme de restitution des capacités souscrites

Selon l'Annexe CMP, les GRT acceptent toute restitution de capacité ferme contractée par un utilisateur à un point d'interconnexion, à l'exception des produits de capacité d'une durée d'un jour ou moins. Revendue lors du processus d'allocation standard, la capacité restituée ne peut être réallouée qu'une fois que toute la capacité disponible a été attribuée. Tant que la capacité n'est pas réattribuée par le GRT, l'expéditeur conserve ses droits et obligations au titre du contrat de capacité.

2.1. Périmètre d'application du mécanisme de restitution

La CRE est favorable à la mise en œuvre du mécanisme de restitution à l'ensemble des PIR et liaisons des réseaux de GRTgaz et TIGF, y compris sur les points d'interconnexion avec les pays tiers Dunkerque, Oltingue et Jura, dans la mesure où ce mécanisme n'entraîne aucun risque financier pour le GRT et peut contribuer à prévenir des situations de congestion contractuelle au moment de l'allocation des capacités. Lors de la consultation publique, une grande majorité d'acteurs a soutenu ce principe de mise en œuvre généralisée.
Concernant le point d'interconnexion de Dunkerque, le mécanisme de capacités restituables actuellement en vigueur prévoit que les expéditeurs qui disposent de plus de 20 % de la capacité ferme technique annuelle ont l'obligation de restituer une partie de ces capacités à GRTgaz dès lors que des demandes exprimées par des expéditeurs tiers ne peuvent être servies. Le fonctionnement de ce mécanisme est satisfaisant et est compatible avec l'application du mécanisme de restitution volontaire prévu par l'Annexe CMP. Il sera donc maintenu au point de Dunkerque.

2.2. Règles de restitution et commercialisation par le GRT des produits restitués

La CRE est favorable aux principes généraux soumis à consultation qui ont fait l'objet d'un soutien majoritaire.
Les expéditeurs ont la possibilité de restituer à partir du 1er octobre 2013 une partie ou la totalité des capacités qu'ils détiennent sans limite de volume ni de durée (à l'exception des produits de capacité d'une durée d'un jour ou moins). Ces produits seront réalloués sous la forme de produits trimestriels (jusqu'à quatre produits consécutifs) et mensuels, sous réserve que cette restitution soit cohérente avec les calendriers prévus par les GRT pour la commercialisation des capacités. Ces produits seront proposés à la commercialisation lors des procédures d'allocation de capacité en vigueur au niveau de chaque point concerné.
De manière générale, de nombreux contributeurs à la consultation publique considèrent que les règles proposées par les GRT pour la déclinaison opérationnelle du mécanisme de restitution sont trop contraignantes, ce qui le rend peu attractif par rapport au marché secondaire. Afin de répondre à ces préoccupations, la CRE estime que le mécanisme de restitution doit être rendu plus flexible pour les expéditeurs. Ainsi, toute capacité restituée qui n'aura pas été réallouée devra être rendue au détenteur initial à l'issue de chaque période de commercialisation. La capacité restituée ne pourra être proposée par le détenteur initial sur le marché secondaire avant la fin de la fenêtre de commercialisation par le GRT des produits correspondants.
Lorsqu'un expéditeur a souscrit des capacités sous forme groupée auprès de deux gestionnaires de réseau adjacents, il n'a pas la possibilité de les restituer de manière dégroupée, c'est-à-dire de restituer séparément les capacités auprès de chaque GRT. Les produits de capacité restitués sous forme groupée doivent être commercialisés par les GRT français sous forme groupée. Les GRT devront faire leurs meilleurs efforts vis-à-vis des GRT adjacents pour une application coordonnée de ce principe, afin d'éviter des situations où un détenteur initial d'un produit groupé resterait redevable de ses droits et obligations auprès d'un seul des deux GRT, l'autre ayant réalloué la capacité qui lui aura été restituée.
En ce qui concerne la règle de priorité pour la réallocation des produits restitués, les capacités restituées en premier sont réallouées en premier. Cette règle a été largement soutenue par les acteurs dans la consultation publique.

2.3. Traitement tarifaire du mécanisme de restitution

La majorité des acteurs ayant contribué à la consultation publique est favorable à ce que le mécanisme de restitution ne soit pas facturé systématiquement au détenteur initial de la capacité comme proposé par GRTgaz et TIGF. Plusieurs contributeurs indiquent que rendre ce mécanisme payant le rendrait moins attractif pour les expéditeurs qui risqueraient alors de privilégier le marché secondaire gratuit. La CRE estime que le mécanisme de restitution doit faire partie des services de base associés à la souscription de capacités par les expéditeurs et n'est donc pas favorable à la facturation du mécanisme de restitution.
Par ailleurs, afin d'assurer la neutralité financière de ce mécanisme pour le GRT, la CRE est favorable à ce que le détenteur initial de la capacité soit redevable de tout différentiel positif entre le prix initial et le prix de revente. Ce principe a été soutenu par la majorité des contributeurs.
Les acteurs sont partagés quant au traitement des sur-revenus potentiels qui pourraient être générés par ce mécanisme dans le cas où le prix de revente serait supérieur au prix initial de la capacité. Plusieurs d'entre eux (six expéditeurs et une association) ne sont pas favorables à la proposition de la CRE de redistribution au marché de ces sur-revenus. Ils considèrent que le détenteur initial de la capacité doit pouvoir bénéficier, au moins en partie, de l'opportunité d'une revente à un prix plus élevé. La proposition de la CRE est soutenue par cinq expéditeurs et une association. La CRE estime que la possibilité d'un gain financier lors d'une restitution ultérieure ne doit pas introduire de biais dans le comportement des acteurs lors des allocations de capacité. Les éventuels sur-revenus seront donc reversés aux utilisateurs du réseau via le compte de régulation des charges et des produits (CRCP) pour les capacités restituées allouées entre le 1er octobre 2013 et le 1er avril 2014 conformément aux dispositions de la décision tarifaire du 13 décembre 2012 (3). Les modalités de redistribution de ces sur-revenus pour les capacités restituées après le 1er avril 2014 seront définies par la CRE après proposition des GRT et travail en concertation gaz.
Le prix initial dont l'expéditeur restera redevable au cas où la capacité restituée n'est pas réallouée ou si elle est réallouée à un prix inférieur au prix initial et qui servira de référence pour le calcul du différentiel entre prix initial et prix de revente sera égal au prix de souscription résultant de l'enchère (ou le terme tarifaire appliqué si le produit n'a pas été souscrit aux enchères) du produit initialement souscrit par le détenteur initial rapporté à la durée du produit restitué. Par exemple, le prix initial d'un produit mensuel restitué issu d'un produit annuel sera égal à 1/12e du prix résultant de l'enchère où le produit annuel a été souscrit (ou bien le terme tarifaire du produit annuel si le produit n'a pas été souscrit aux enchères).

2.4. Coordination avec les opérateurs et les régulateurs des réseaux adjacents

Les modalités de mise en œuvre de ce mécanisme ont fait l'objet de travaux bilatéraux avec les autorités de régulation et les GRT espagnols (dans le cadre de l'initiative régionale Sud), allemands et belges. Toutefois, des divergences demeurent dans la façon dont ce mécanisme est appliqué dans les différents pays. La CRE poursuivra ses travaux en collaboration avec GRTgaz et TIGF et les autorités de régulation des pays adjacents en 2013 et 2014 afin de parvenir à une meilleure convergence des modalités de mise en œuvre de part et d'autre des points d'interconnexion, plus particulièrement pour les produits groupés.

  1. Accroissement de la capacité offerte par un mécanisme de surréservation et de rachat

Selon l'Annexe CMP, les GRT offrent de la capacité additionnelle ferme au-delà de la capacité technique aux points d'interconnexion sur la base de scénarios statistiques d'utilisation de la capacité. Pour déterminer la capacité additionnelle offerte, le GRT s'appuie sur une analyse de risque afin d'éviter une obligation de rachat excessive, suivant un calcul fondé sur une approche dynamique. Ces capacités additionnelles ne sont attribuées que si toutes les autres capacités, y compris les capacités résultant de l'application d'autres procédures de gestion de la congestion, ont été allouées. Le système de surréservation et de rachat est fondé sur un régime incitatif tenant compte des risques encourus par le GRT qui propose de la capacité additionnelle. Lorsque le GRT est conduit à mettre en œuvre le rachat pour préserver l'intégrité du système, il applique une procédure fondée sur le marché. La répartition des recettes et des coûts entre le GRT et l'utilisateur du réseau est décidée par l'autorité de régulation.
La CRE précise que ce mécanisme a pour seul objectif d'améliorer l'utilisation des capacités techniques existantes et n'entraine pas une augmentation desdites capacités techniques.

3.1. Périmètre d'application du mécanisme de surréservation et de rachat

Dans leurs réponses à la consultation publique, de nombreux acteurs ont émis des réserves quant à une mise en œuvre généralisée au 1er octobre 2013 de ce dispositif, qui est perçu comme un mécanisme risqué. Ils ont appelé à une mise en œuvre progressive fondée sur une analyse des risques par point d'interconnexion.
La CRE partage ce point de vue. Elle estime que les modalités de mise en œuvre du mécanisme de surréservation et de rachat doivent être déterminées de manière prudente, progressive et coordonnée entre GRT et régulateurs adjacents. La mise en œuvre de ce mécanisme doit s'inscrire dans un processus dynamique permettant de bénéficier du retour d'expérience. Elle doit aussi reposer sur une analyse précise des risques pour chaque point d'interconnexion, intégrant en particulier l'analyse de l'utilisation passée du point d'entrée-sortie tout en tenant compte des souscriptions de capacités.
Les analyses de risques menées par GRTgaz et TIGF accompagnant la présente délibération montrent qu'au 1er octobre 2013, seuls les points Taisnières H et Obergailbach seront concernés par ce dispositif. Ces analyses de risques devront être réactualisées par GRTgaz et TIGF au plus tard le 1er juillet de chaque année en vue d'une réévaluation de l'application de la surréservation et le rachat au 1er octobre.
La CRE approuve les propositions de GRTgaz et de TIGF d'appliquer le mécanisme de surréservation et de rachat aux PIR Taisnières H et Obergailbach au 1er octobre 2013 et de ne pas l'appliquer aux points d'entrée-sortie suivants :
― la liaison Nord-Sud, qui fait l'objet d'une forte congestion physique, car les risques de rachat sont élevés ;
― l'interface GRTgaz Sud ― TIGF, dans la mesure où les capacités disponibles à cette interconnexion ne seront plus commercialisées à compter du 1er avril 2015, date de fusion des PEG Sud et TIGF ;
― les points d'interconnexion avec l'Espagne, le point Larrau étant caractérisé par une forte congestion physique dans le sens France vers Espagne depuis deux ans. De plus, l'augmentation des capacités techniques à partir du 1er avril 2013 à Larrau ne permet pas d'avoir le recul nécessaire pour le GRT sur le comportement des expéditeurs. Par ailleurs, les capacités fermes au point d'interconnexion Biriatou sont très faibles pour que le mécanisme de surréservation et de rachat présente un intérêt pour le marché.
La CRE demande à TIGF de poursuivre sa concertation avec Enagas afin d'offrir dès que possible de la capacité additionnelle à Larrau dans le sens Espagne vers France de manière conjointe.
Concernant les points d'interconnexion avec les pays tiers, les acteurs ont, dans leur grande majorité, soutenu le report de l'application à une date ultérieure du mécanisme de surréservation et de rachat. La CRE n'est pas favorable à la mise en œuvre de ce mécanisme aux points Dunkerque, Oltingue et Jura au 1er octobre 2013. L'application de ce dispositif sur ces points d'interconnexion nécessite de mener une analyse particulière prenant en compte les caractéristiques des systèmes adjacents qui ne sont pas concernés par les obligations du 3e Paquet Energie (règlement [CE] n° 715/2009 et directive 2009/73/CE).

3.2. Offre de capacité additionnelle

Au 1er octobre 2013 et compte tenu des résultats des analyses de risques et des scénarios statistiques d'utilisation de la capacité, la CRE estime que l'offre de capacité additionnelle de GRTgaz à Taisnières H et Obergailbach doit porter sur des produits trimestriels, mensuels et quotidiens et représenter environ 5 % de la capacité ferme technique. Le volume de capacité additionnelle offert sur les produits trimestriels et mensuels pourra être revu en cours d'année par la CRE sur demande motivée des GRT. Le GRT informera la CRE au préalable des révisions éventuelles des volumes de capacité additionnelle sur les produits quotidiens.
Conformément à l'Annexe CMP, la capacité additionnelle est agrégée à la capacité technique et proposée à la commercialisation dans le cadre des processus d'allocation des capacités usuels.

3.3. Procédure de rachat

Si la capacité additionnelle a été souscrite, il peut arriver que le GRT ne soit pas en mesure d'assurer l'intégralité des nominations. La CRE a soumis à consultation la proposition de GRTgaz et TIGF consistant en une mise en œuvre d'un mécanisme de rachat simplifié au 1er octobre 2013 fondé sur un rachat à chaque expéditeur sur la base du prorata des capacités fermes détenues. Neuf contributeurs (7 expéditeurs, une association et la Bundesnetzagentur) ont fait part de leur désaccord avec ce dispositif, dans la mesure où il ne repose pas sur une procédure de marché, c'est-à-dire par laquelle les expéditeurs manifesteraient leur volonté de rétrocéder leur capacité en fonction du prix payé par le GRT. Pour plusieurs acteurs, un rachat sur la base du prorata pourrait être envisagé mais seulement comme un mécanisme de dernier recours, avec une première étape reposant sur le volontariat des expéditeurs. Neuf réponses (de la part de deux associations, quatre expéditeurs, deux GRT et un opérateur d'infrastructures) soutiennent l'adoption d'un mécanisme transitoire fondé sur le prorata permettant de tester ce dispositif.
Au regard de ces résultats et compte tenu du fait que ce mécanisme simplifié ne serait pas fondé sur le marché, alors que cela est requis par l'Annexe CMP, la CRE demande à GRTgaz de prévoir une première phase de rachat reposant sur le volontariat des expéditeurs. Dans l'attente de la mise en place d'une plate-forme électronique de rachat en coordination avec les GRT adjacents, GRTgaz devra mettre en place une procédure simplifiée d'appel au marché. Si cette procédure volontaire d'appel au marché ne permet pas de réduire suffisamment les nominations, le GRT fera alors appel à la règle par défaut suivante : le GRT rachètera à chaque expéditeur détenteur de capacité ferme sur le point concerné, des capacités fermes au prorata des capacités fermes détenues, après interruption des capacités interruptibles des points concernés.

3.4. Prix de rachat

La CRE a proposé dans la consultation publique un prix de rachat fondé sur le différentiel de prix entre les places de marché de part et d'autre du point d'interconnexion, plafonné à trois fois le prix régulé de la capacité journalière. Huit acteurs (deux associations et six expéditeurs) sont favorables à cette mesure, même si trois expéditeurs ne souhaitent pas que le prix de rachat soit plafonné. Neuf répondants (une association, quatre expéditeurs, trois GRT et un opérateur d'infrastructures) ne sont pas d'accord avec cette proposition de prix de rachat. Certains d'entre eux préfèrent retenir l'approche plus prudente des GRT consistant à racheter la capacité sur la base du prix régulé.
Afin de refléter un prix de marché tout en limitant les risques de dérive de coûts de rachat pour le GRT, la CRE estime que, pour la première phase d'appel au marché, le prix de rachat maximal doit être égal à la moyenne des prix d'adjudication des enchères trimestrielles, mensuelles et journalières pondérée des quantités souscrites lors de ces enchères, majorée de 25 %, pour le type de capacité (groupée ou non groupée). En cas de mise en œuvre de la règle par défaut, le prix de rachat sera égal au prix indiqué précédemment non majoré de 25 %. Dans le cas où le GRT n'offre pas de produits lors des enchères journalières, le prix d'adjudication considéré sera égal au prix régulé du produit journalier concerné.
Le lancement de la procédure de rachat sur un point d'interconnexion impliquera une interdiction pour les expéditeurs de renominer à la hausse sur ce point jusqu'à la fin de la journée gazière concernée.

3.5. Traitement tarifaire du mécanisme de surréservation et de rachat

L'Annexe CMP prévoit qu'une régulation incitative doit être mise en place afin d'encadrer le système de surréservation et de rachat. Dans la consultation publique, une majorité d'acteurs soutient la proposition de la CRE consistant à couvrir 50 % des recettes et des coûts par le CRCP. Certains acteurs souhaitent en revanche que l'ensemble des recettes et des coûts soient intégrés au CRCP, d'autres considèrent que les recettes doivent bénéficier aux acteurs portant les risques de ce mécanisme.
La CRE estime que les recettes liées à la vente de capacité additionnelle et les coûts potentiels générés par le rachat doivent être couverts à 50 % par le CRCP. Ce partage des revenus et des coûts permettra d'accorder une rémunération aux efforts fournis par le GRT tout en l'incitant à maximiser la capacité effective disponible pour les expéditeurs.

3.6. Coordination avec les régulateurs des réseaux adjacents

Des travaux avec les régulateurs des réseaux adjacents ont été menés par la CRE pour la coordination de la mise en œuvre de la surréservation et le rachat. Il n'a pas été possible d'arriver à une convergence complète de part et d'autre des points d'interconnexion.
La CRE poursuit ses travaux avec la CNE en vue d'une mise en œuvre coordonnée de la surréservation et du rachat dès que possible aux points d'interconnexion Larrau et Biriatou.
La mise en œuvre de ce mécanisme au PIR Taisnières H a fait l'objet de nombreux échanges avec le régulateur (CREG) et le GRT (Fluxys Belgium) belges. Une certaine convergence sur l'offre de capacité additionnelle au 1er octobre 2013 sur les produits journaliers sera assurée de part et d'autre du point d'interconnexion. GRTgaz et Fluxys Belgium, sous réserve d'une décision favorable de la CREG, commercialiseront des capacités additionnelles sur les produits journaliers à partir du 1er octobre 2013. La CRE demande à GRTgaz de faire ses meilleurs efforts afin de grouper la capacité additionnelle avec les capacités additionnelles offertes par Fluxys Belgium et de se coordonner sur la procédure de rachat.
Concernant le PIR Obergailbach, le système de surréservation et de rachat ne sera a priori pas mis en œuvre en Allemagne. La Bundesnetzagentur invoque la disposition de l'Annexe CMP qui permet à un Etat membre de ne pas appliquer ce mécanisme dès lors qu'il introduit le mécanisme UIOLI de capacités fermes à un jour. Ce dernier mécanisme a été en effet mis en œuvre de manière unilatérale en Allemagne en 2012. La quasi-totalité des contributeurs à la consultation publique (15 répondants sur 16) n'est pas favorable à l'application du mécanisme UIOLI ferme à un jour au point d'interconnexion Obergailbach, dans la mesure où il réduirait la flexibilité dont disposent les expéditeurs pour assurer leur équilibrage. En outre, l'application de ce mécanisme n'est rendue obligatoire par l'Annexe CMP qu'à partir du 1er juillet 2016, sur la base d'une évaluation de la congestion réalisée par l'ACER. En conséquence, la CRE décide d'appliquer le système de surréservation et de rachat au 1er octobre 2013 et non pas le mécanisme UIOLI de capacités fermes à un jour. La CRE a demandé à son homologue allemand de mettre en place un système de surréservation et de rachat du côté allemand du point d'interconnexion (Medelsheim).

  1. Mécanisme UIOLI de capacités de long terme

Le mécanisme UIOLI de capacités de long terme prévu par l'Annexe CMP est très proche du système en vigueur en France depuis plusieurs années. Quelques acteurs ont indiqué la nécessité de prendre en compte la mise en œuvre du code réseau CAM, particulièrement pour la coordination des retraits de capacité de part et d'autre du point d'interconnexion pour les produits groupés.
Seuls quelques ajustements sont nécessaires pour rendre le mécanisme UIOLI long terme en vigueur en France conforme à l'Annexe CMP. La CRE demande en conséquence à GRTgaz et TIGF d'adapter le mécanisme à partir du 1er octobre 2013 de la manière suivante :
― sur tous les PIR et liaisons des réseaux de GRTgaz et TIGF, le GRT surveille les cas de sous-utilisation systématique de la capacité par un expéditeur, c'est-à-dire quand l'utilisateur utilise annuellement en moyenne entre le 1er avril et le 30 septembre et entre le 1er octobre et le 31 mars, moins de 80 % de sa capacité acquise par un contrat d'une durée effective de plus d'un an.
Dans le cas où d'autres utilisateurs demandent des capacités fermes sur ce même point sans que ces demandes n'aient pu être satisfaites dans le cadre des processus d'allocation usuels, le GRT informe la CRE et étudie la situation de la congestion au point d'entrée-sortie concerné. Si l'expéditeur n'a pas pu fournir une justification appropriée, le retrait de la capacité est proposé par le GRT et décidé ensuite par la CRE.
La décision de retrait de produits groupés doit être coordonnée entre les GRT et les régulateurs des réseaux adjacents. La CRE mène des travaux avec ses homologues en vue d'une application coordonnée des décisions de retrait aux interconnexions.

  1. Décision de la CRE

La CRE approuve les modalités de mise en œuvre de l'annexe I du règlement (CE) n° 715/2009 sur les procédures de gestion de la congestion proposées par GRTgaz et TIGF (voir annexes), sous réserve des modifications apportées par la CRE.
Au 1er octobre 2013, GRTgaz et TIGF mettront en place les mécanismes CMP ayant les principales caractéristiques décrites ci-après :
En ce qui concerne le mécanisme de restitution de la capacité :
― le mécanisme de restitution sera mis en œuvre à tous les PIR et liaisons (y compris Dunkerque, Oltingue et Jura) ;
― les expéditeurs ont la possibilité de restituer à partir du 1er octobre 2013 une partie ou la totalité des capacités qu'ils détiennent sans limite de volume ni de durée. Ces produits seront réalloués sous la forme de produits trimestriels (jusqu'à quatre produits consécutifs) et mensuels. Ces produits seront proposés à la commercialisation lors des processus d'allocation de capacité en vigueur au niveau de chaque point concerné ;
― si la capacité restituée n'est pas réallouée en totalité, le solde est rendu au détenteur initial à l'issue de chaque période de commercialisation ;
― la capacité restituée ne peut être proposée par le détenteur initial sur le marché secondaire avant la fin de la fenêtre de commercialisation par le GRT des produits correspondants ;
― l'expéditeur n'a pas la possibilité de dégrouper un produit groupé, c'est-à-dire de restituer séparément des capacités initialement souscrites comme groupées auprès de deux GRT de réseaux adjacents ;
― le GRT commercialise les produits restitués groupés sous forme de produits groupés ;
― les capacités sont réallouées dans l'ordre où elles ont été restituées ;
― le mécanisme de restitution fait partie des services de base associés à la souscription de capacités par l'expéditeur. Ce service ne doit pas faire l'objet d'une facturation. Dans le cas où le prix initial est supérieur au prix de revente de la capacité, le GRT facture ce différentiel au détenteur initial de la capacité ;
― dans le cas où le prix de revente est supérieur au prix initial de la capacité, le sur-revenu est reversé au CRCP pour les capacités restituées réallouées entre le 1er octobre 2013 et le 1er avril 2014. Les modalités de redistribution de ces sur-revenus pour les capacités restituées réallouées après le 1er avril 2014 seront définies par la CRE après proposition des GRT et travail en concertation gaz ;
― le prix initial dont l'expéditeur restera redevable au cas où la capacité restituée n'est pas réallouée ou si elle est réallouée à un prix inférieur au prix initial et qui servira de référence pour le calcul du différentiel entre prix initial et prix de revente sera égal au prix de souscription résultant de l'enchère (ou le terme tarifaire appliqué si le produit n'a pas été souscrit aux enchères) du produit initialement souscrit par le détenteur initial rapporté à la durée du produit restitué.
En ce qui concerne le mécanisme de surréservation et de rachat :
― compte tenu des analyses de risques menées par GRTgaz et TIGF annexées à la présente délibération, seuls les points Taisnières H et Obergailbach seront concernés par ce dispositif au 1er octobre 2013. Ces analyses de risques seront réactualisées par GRTgaz et TIGF au plus tard le 1er juillet 2014 en vue d'une réévaluation de l'application de la surréservation et le rachat au 1er octobre 2014 ;
― l'offre de capacité additionnelle de GRTgaz à Taisnières H et Obergailbach portera sur des produits trimestriels, mensuels et quotidiens, à hauteur de 5 % environ de la capacité ferme technique. Le volume de capacité additionnelle offert sur les produits trimestriels et mensuels pourra être revu en cours d'année par la CRE sur demande motivée des GRT. Le GRT informera la CRE au préalable des révisions éventuelles des volumes de capacité additionnelle sur les produits quotidiens ;
― conformément à l'Annexe CMP, la capacité additionnelle est agrégée à la capacité technique et proposée à la commercialisation dans le cadre des processus d'allocation des capacités usuels ;
― en cas de lancement d'une procédure de rachat, GRTgaz prévoit une première phase fondée sur le volontariat des expéditeurs. Pour cette première phase, le prix de rachat maximal doit être égal à la moyenne des prix d'adjudication des enchères trimestrielles, mensuelles et journalières pondérée des quantités souscrites lors de ces enchères, majorée de 25 %, pour le type de capacité (groupée ou non groupée) ;
― si cette procédure de rachat ne permet pas de réduire suffisamment les nominations, le GRT fait appel à la règle par défaut suivante : le GRT rachète à chaque expéditeur détenteur de capacité ferme sur le point concerné, des capacités fermes au prorata des capacités fermes détenues, après interruption des capacités interruptibles des points concernés au prix précisé à l'alinéa précédent non majoré de 25 % ;
― dans le cas où le GRT n'offre pas de produits lors des enchères journalières, le prix d'adjudication considéré est égal au prix régulé du produit journalier concerné ;
― le lancement de la procédure de rachat sur un point d'interconnexion entraîne l'interdiction pour les expéditeurs de renominer à la hausse sur ce point jusqu'à la fin de la journée gazière concernée ;
― les recettes liées à la vente de capacité additionnelle et les coûts potentiels générés par le rachat sont couverts à 50 % par le CRCP ;
― la CRE demande à GRTgaz de faire ses meilleurs efforts afin de grouper la capacité additionnelle avec les capacités additionnelles offertes par les GRT adjacents et de se coordonner sur la procédure de rachat ;
― la CRE demande à TIGF de poursuivre sa concertation avec Enagas afin d'offrir dès que possible de la capacité additionnelle à Larrau dans le sens Espagne vers France de manière conjointe.
En ce qui concerne le mécanisme UIOLI de capacités de long terme :
La CRE demande à GRTgaz et TIGF d'adapter le mécanisme existant UIOLI de long terme à partir du 1er octobre 2013 de la manière suivante :
― sur tous les PIR et liaisons des réseaux de GRTgaz et TIGF, le GRT surveille les cas de sous-utilisation systématique de la capacité par un expéditeur, c'est-à-dire quand l'utilisateur utilise annuellement en moyenne entre le 1er avril et le 30 septembre et entre le 1er octobre et le 31 mars, moins de 80 % de sa capacité acquise par un contrat d'une durée effective de plus d'un an ;
― dans le cas où d'autres utilisateurs demandent des capacités fermes sur ce même point sans que ces demandes n'aient pu être satisfaites dans le cadre des processus d'allocation usuels, le GRT informe la CRE et étudie la situation de la congestion au point d'entrée-sortie concerné. Si l'expéditeur n'a pas pu fournir une justification appropriée, le retrait de la capacité est proposé par le GRT et décidé ensuite par la CRE ;
― la décision de retrait de produits groupés doit être coordonnée entre les GRT et les régulateurs des réseaux adjacents.
La présente délibération sera publiée au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 27 juin 2013.

Pour la Commission de régulation de l'énergie :

Le président,

P. de Ladoucette

(1) Règlement (CE) n° 715/2009 du Parlement européen et du Conseil concernant les décisions d'accès aux réseaux de transport de gaz naturel. (2) Délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 29 mars 2013 portant décision relative à la mise en œuvre anticipée du code de réseau CAM pour la commercialisation de capacités mensuelles au point d'entrée Obergailbach et de capacités quotidiennes aux points d'entrée Taisnières H et Obergailbach. (3) Délibération de la Commission de régulation de l'énergie du 13 décembre 2012 portant décision sur le tarif d'utilisation des réseaux de transport de gaz naturel.