La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,
Vu le code de la santé publique, et notamment les articles L. 2151-5 et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;
Vu les décisions de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine du 17 février 2012 autorisant l'Institut national de la santé et de la recherche médicale à mettre en œuvre un protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu la décision du 8 septembre 2015 modifiant la décision n° 2013-11 du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionnées à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;
Vu la demande présentée le 31 octobre 2015 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (unité UMR 861, Laboratoire I-Stem, Evry) aux fins d'obtenir le renouvellement de son autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;
Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 11 février 2016 ;
Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 21 décembre 2015 ;
Vu les rapports d'expertise en date du 11 décembre 2015 ;
Considérant qu'une première autorisation a été accordée à cette équipe en 2012 pour une durée de quatre ans ; que la demande s'inscrit dans la continuité du protocole précédent ; que l'équipe se fonde par ailleurs sur les résultats d'un précédent protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines autorisé ;
Considérant que l'équipe utilise la lignée SA-01 provenant de Cellartis (Suède), déjà présente sur le territoire national ; que la lignée a été importée par Marc Peschanski en vertu d'une autorisation délivrée le 16 février 2005 par arrêté des ministres de la santé et de la recherche ; qu'à l'occasion de la demande d'autorisation d'importation déposée par Marc Peschanski le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et de celles relatives à l'information et au recueil du consentement des couples a été vérifié et la demande d'autorisation présente de nouveau l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des conditions législatives et réglementaires ; que l'ensemble de ces documents est fourni en annexe de la présente demande ;
Considérant que le projet se propose de mettre au point une méthodologie standardisée d'analyse de toxicité de molécules et d'adapter un modèle cellulaire à l'analyse de la toxicité chronique d'une molécule ; que ce sujet est d'importance, en particulier pour l'évaluation des molécules thérapeutiques ou de toute molécule manipulée par l'homme et potentiellement dangereuse pour sa santé ;
Considérant que les approches classiques de mesures de toxicité se font jusqu'à présent à partir de modèles animaux, alors que ces derniers sont imparfaits dans la mesure où la physiologie animale n'est pas comparable à la physiologie humaine ; que la réponse animale ne sera souvent pas prédictive de la réponse humaine ; que ces tests sont en conséquence généralement réalisés à des doses maximales des produits (mesurant une toxicité aiguë), ce qui n'est pas prédictif de la réponse humaine à des doses plus faibles, mais répétées (toxicité chronique), habituellement utilisées en thérapeutique ; que les systèmes cellulaires utilisant des cellules d'origine tumorale (non physiologiques) ne constituent pas non plus des modèles fiables dans ce cadre, pas plus que les cultures primaires (à partir de biopsies), car il est très difficile de les conserver en laboratoire posant ainsi des problèmes de reproductibilité ;
Considérant qu'il n'existe pas à ce jour de système cellulaire présentant la possibilité d'être standardisé car l'ensemble de ces types de cellules ne sont disponibles qu'en nombre restreint ; qu'un nouveau système d'analyse prédictive de la toxicité des produits est donc nécessaire ; qu'un système cellulaire in vitro associé aux techniques à large échelle de mesure des protéines (protéomique), des ARN messagers (transcriptomique) ou autre (par exemple métabolique) et à l'analyse informatique pourrait, à terme, remplacer les modèles animaux ;
Considérant que le projet se divise en plusieurs parties : la mise au point de protocoles de différenciation guidée et de sélection des cellules, la mise au point du test miniaturisé d'un modèle de toxicité en doses répétées, se fondant sur la culture de cellules cibles (cellules musculaires et neurones), l'automatisation des cellules cibles permettant d'identifier des gènes interférant avec l'expression des biomarqueurs, et donc susceptibles de modifier l'état de prétoxicité et la comparaison de la toxicité aiguë et chronique des statines (molécules largement prescrites pour diminuer le cholestérol LDL) sur les précurseurs mésodermiques dérivés de la lignée de cellules souches embryonnaires SA-01 ;
Considérant qu'en utilisant les deux modèles développés (cellules mésodermiques reflétant le lignage musculaire et neurones pour analyser le développement neuronal) et deux types de molécules (statines et acide valproïque, utilisé dans le traitement de l'épilepsie), l'équipe souhaite poursuivre son programme de recherche en se consacrant à l'exploration de l'analyse des mécanismes de la toxicité chronique des molécules ; qu'il est ainsi prévu d'identifier les voies de signalisation mises en jeu et de rechercher les modifications de l'épissage de certains gènes (processus qui modifie la structure de l'ARN messager et donc celle de la protéine qui est traduite), à travers l'analyse des modifications des protéines se liant à l'ARN ; que l'approche se fonde sur une analyse de séquençage à haut débit, maîtrisée par le laboratoire I-Stem de Marc Peschanski, qui permettra d'identifier des biomarqueurs détectant la toxicité, mais aussi des voies de compensation (permettant d'envisager une protection contre cette toxicité) ; que ces analyses, qui se veulent automatisées, seront approfondies dans un deuxième temps par des tests fonctionnels pour mieux appréhender le rôle des gènes régulateurs ;
Considérant que la finalité médicale du projet et l'objectif thérapeutique ne font aucun doute ; qu'il s'agit de contribuer à la prédiction des effets délétères des médicaments : analyse des voies moléculaires de toxicité via des lignées de cellules souches embryonnaires humaines pour contribuer à la mise en place d'un test reproductible visant à réduire le nombre de produits candidats et à se concentrer sur les moins toxiques avant leur utilisation chez l'être humain ; que cette recherche apportera des informations mécanistiques qui pourraient ainsi contribuer à de nouvelles stratégies visant à diminuer les effets délétères des médicaments et à terme déboucher vers une approche de médecine de précision utilisant les informations génomiques des individus lors de la prescription de certains médicaments au regard des risques de toxicité ;
Considérant qu'en l'état des connaissances scientifiques elle ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires humaines ; que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres cellules souches ; que les conséquences des anomalies génétiques et des modifications épigénétiques (multiples et différentes pour chaque lignée) créées par le processus de reprogrammation lui-même et le processus de différenciation des cellules iPS sont encore mal appréciées, et, en ce sens, ne font que renforcer la nécessaire comparaison avec des cellules CSEh ; qu'une des plus grandes difficultés actuelles est l'extrême hétérogénéité des lignées d'iPS, aggravée par la diversité des techniques de reprogrammation, des conditions de culture et des cellules somatiques d'origine (induisant une « mémoire épigénétique » persistante), que les CSEh sont, par comparaison, beaucoup plus homogènes, toutes issues de la masse interne du blastocyste, et spontanément pluripotentes, sans nécessité d'induire des modifications génétiques ou épigénétiques, pour leur conférer cette pluripotence ; que, dans le cadre du protocole de recherche envisagé, il importe d'obtenir une population homogène de cellules à un stade de différenciation donné pour analyser les biomarqueurs pertinents de la prétoxicité ;
Considérant en conséquence que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche, d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques, d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues dans le respect des principes fondamentaux prévus aux articles 16 à 16-8 du code civil, et avec le consentement préalable du couple géniteur, et sans qu'aucun paiement, quelle qu'en soit la forme, ne leur ait été alloué ;
Considérant que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ; que Marc Peschanski, qui dirige le laboratoire i-Stem, institut dédié aux cellules souches à visée thérapeutique est un expert reconnu dans le domaine comme en témoigne entre autres le nombre et la qualité de ses travaux scientifiques publiés dans des revues internationales de haut niveau (PNAS, Nat Biotechnol, Hum. Mol. Genet, Stem Cell, Cell Rep…) ; que les moyens humains et financiers de l'équipe sont en adéquation avec le projet ; que l'équipe comprend trois ingénieurs d'étude, dont un membre fondateur du laboratoire I-Stem et deux autres ayant reçu une formation en génomique fonctionnelle assurant la faisabilité d'un tel projet tant au niveau des cultures cellulaires, des traitements pharmacologiques et des techniques de biologie moléculaire ; que la structure est pérenne et l'équipe est reconnue internationalement pour ses travaux, comme l'est le laboratoire i-Stem ;
Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée ; que cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des embryons et des cellules embryonnaires ; que les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrits et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine qui a par ailleurs procédé à une visite du site en mars 2015,
Décide :