La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,
Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 2151-5 et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;
Vu les décisions de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine du 21 janvier 2011 autorisant l'Institut national de la santé et de la recherche médicale à mettre en œuvre un protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu la décision du 8 septembre 2015 modifiant la décision 2013-11 du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionnées à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;
Vu la demande présentée le 31 octobre 2015 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (unité UMR 861, laboratoire I-Stem, Evry) aux fins d'obtenir le renouvellement de son autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;
Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 23 décembre 2015 ;
Vu les rapports d'expertise en date du 30 novembre et 6 décembre 2015 ;
Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 11 février 2016 ;
Considérant qu'une première autorisation a été accordée à cette équipe en 2011 pour une durée de cinq ans ; que la demande s'inscrit dans la continuité du protocole précédent ; que les résultats obtenus à l'occasion de cette première autorisation permettent d'envisager un protocole de recherche biomédicale de phase I/II à partir de 2018, associant le laboratoire I-Stem, l'Institut de la vision (hôpital des Quinze-Vingts, Paris) et le laboratoire de thérapie cellulaire de Jérôme Larghéro (hôpital Saint-Louis, Paris) ;
Considérant que le projet de recherche utilise les lignées SA-01 provenant de Cellartis (Suède), RC-09 provenant de Roslin Cells (Royaume-Uni) et WA-09 provenant du WiCell Research Institute (Etats-Unis) ; que, déjà présentes sur le territoire national, ces lignées ont été importées par Marc Peschanski (INSERM UMR 861) en vertu d'autorisations délivrées le 16 février 2005 par arrêté des ministres de la santé et de la recherche et le 17 décembre 2010 par décision de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine après avis favorable de son conseil d'orientation, d'une part, et par AnneLise Bennaceur (INSERM UMR 935) en vertu d'une autorisation délivrée le 20 septembre 2006 par décision de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine après avis favorable de son conseil d'orientation, d'autre part ;
Considérant qu'à l'occasion des demandes d'autorisation d'importation déposées par Marc Peschanski et AnneLise Bennaceur, le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et de celles relatives à l'information et au recueil du consentement des couples a été vérifié et la demande d'autorisation présente de nouveau l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des conditions législatives et réglementaires ; que le conseil d'orientation souligne que l'ensemble de ces documents sont de nouveau fournis en annexe de la présente demande ;
Considérant que le projet concerne le développement d'un produit de thérapie cellulaire sous la forme de cellules de l'épithélium pigmentaire rétinien (EPR) issues de cellules souches embryonnaires humaines (CSEh), administrables à des patients atteints de la dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) ; qu'une seconde partie du projet, menée en parallèle, consiste à induire la différenciation des cellules souches embryonnaires humaines en précurseurs des photorécepteurs, également dans une perspective de thérapie cellulaire ;
Considérant que la rétine est un tissu complexe, prolongement du système nerveux central, qui tapisse l'intérieur du globe oculaire ; qu'elle est composée de deux couches : la couche pigmentaire (externe) et la couche interne, réceptrice de la lumière, composée de neurones sous la forme de nombreux photorécepteurs et de cellules traitant et acheminant l'information visuelle vers le cerveau (nerf optique) ; que la couche pigmentaire est un épithélium qui synthétise de la mélanine et est en relation étroite avec les photorécepteurs ; que cet épithélium est indispensable au développement et aux fonctions vitales des photorécepteurs et, donc, à la vision ; que les cellules de l'EPR ont un rôle actif dans la phototransduction et participent au développement et au renouvellement des segments externes des photorécepteurs ;
Considérant que certaines pathologies génétiques dégénératives touchent la rétine, les rétinites pigmentaires, alors que d'autres surviennent au cours du vieillissement, comme la DMLA, qui touche avant tout l'épithélium pigmentaire de la rétine et, par ricochet, les photorécepteurs ; que les cellules rétiniennes et épithéliales pigmentaires de l'œil ne se régénèrent pas et les traitements ne peuvent être que locaux, in situ ; que de nouvelles molécules anti-angiogéniques ont permis d'améliorer certains aspects de la DMLA mais elles ne remplacent pas les cellules lésées et ne sont utilisables que pour une fraction de patients ;
Considérant qu'une approche consisterait à apporter in situ des cellules épithéliales pigmentaires, ce qui apparaît quasiment impossible avec les cellules adultes (qu'il faudrait prélever sur l'œil) ; que de récents protocoles fiables et reproductibles ont permis d'obtenir en nombre important des cellules de l'EPR à partir de cellules souches embryonnaires humaines et huit essais cliniques (aux Etats-Unis, en Angleterre, en Corée du Sud et en Israël) sont en cours, utilisant ces cellules in situ dans la DMLA et dans une forme génétique de dégénérescence, la maladie de Stagardt ;
Considérant que les travaux réalisés depuis 2011 dans le cadre de la première autorisation délivrée par l'Agence de la biomédecine ont permis de mettre au point les conditions pour un protocole de recherche biomédicale utilisant des cellules de l'EPR dérivées de CSEh ; qu'un protocole de différenciation des CSEh robuste et reproductible en cellules de l'EPR a permis l'obtention d'une population pure de cellules de l'EPR parfaitement polarisées ; que ces cellules ont été associées à un support biocompatible, sur lequel elles seront ensemencées préalablement à leur implantation, et qui sera développé dans des conditions GMP (good manufacturing practices) par le laboratoire de Jérôme Larghéro ; que la fonctionnalité des cellules de l'EPR a été analysée dans un modèle préclinique de greffe sous-rétinienne chez le rat RCS (Royal College of Surgeons), reproduisant un déficit des EPR et une dystrophie rétinienne ;
Considérant que la poursuite des travaux de recherche s'articule autour de la validation préclinique du protocole en associant le laboratoire I-Stem à des laboratoires (disposant d'autorisations de protocoles de recherche délivrées par l'Agence de la biomédecine) plus spécifiquement chargés des études de toxicologie, de tumorigénicité et d'amplification du produit cellulaire ;
Considérant que la finalité médicale du projet et l'objectif thérapeutique ne font aucun doute ;
Considérant qu'en l'état des connaissances scientifiques, elle ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires humaines ; que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres cellules souches ; que la finalité du programme de recherche est de rendre accessible au plus grand nombre de patients un traitement de thérapie cellulaire efficace dans le traitement de la DMLA et la maladie de Stagardt, ce qui n'apparaît pas possible actuellement avec les tissus fœtaux utilisés dans la mesure où l'existence de problèmes logistiques d'obtention et de contrôle qualité majeurs limitent l'extension de cette approche à un grand nombre de patients ;
Considérant que de nombreuses équipes de recherche travaillent actuellement sur des projets utilisant à la fois des cellules souches embryonnaires humaines et des cellules souches pluripotentes induites (cellules iPS) ; que le conseil d'orientation constate que cette démarche comparative apparaît absolument nécessaire - quel que soit le protocole - pour, d'un point de vue fondamental, maîtriser notre connaissance des cellules iPS, de leur reprogrammation, de leur différenciation et de leurs risques, ce qui ne peut être étudié que par comparaison avec les CSEh, d'une part, et définir des standards de qualité reconnus internationalement, comme c'est le cas pour les CSEh, et des lignées de référence, d'autre part ; que, compte tenu du peu de recul sur les iPS, de l'absence de lignée de grade clinique immédiatement disponible en France - alors que de telles lignées CSEh sont disponibles - et des contraintes réglementaires et de sécurité requises pour une application clinique, un essai clinique utilisant ces cellules iPS dans le traitement de la DMLA et la maladie de Stagardt n'est pas envisageable en France à l'heure actuelle ; qu'un essai clinique utilisant des iPS a démarré au Japon, mais il prévoit l'utilisation de cellules qui ne sont pas de grade clinique et a été suspendu en août 2015 ; qu'au contraire, plus de quatre ans se sont écoulés depuis les premiers essais cliniques avec les CSEh et de nouveaux sont en préparation, sans qu'aucun effet indésirable majeur n'ait été décrit ;
Considérant que, compte tenu de ces incertitudes, la communauté scientifique et médicale s'accorde sur le fait que, pour les prochaines années, les CSEh apparaissent en l'état actuel des connaissances plus sûres et saines dans ce type d'application, ce qui justifie le choix des CSEh ; que, dans la mesure où le programme de l'équipe de Christelle Monville s'oriente vers une application clinique, il n'existe pas aujourd'hui de produit cellulaire alternatif ayant une efficacité comparable et qu'il est donc justifié que cette équipe poursuive son programme avec des CSEh afin de parvenir à un essai clinique rapide dans l'intérêt des patients ;
Considérant en conséquence que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche, d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques, d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues dans le respect des principes fondamentaux prévus aux articles 16 à 16-8 du code civil, et avec le consentement préalable du couple géniteur, et sans qu'aucun paiement, quelle qu'en soit la forme, ne leur ait été alloué ;
Considérant que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ; que l'équipe est compétente et reconnue au niveau international ; que les publications attestent de son niveau d'excellence et que la structure est pérenne ;
Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée ; que cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des embryons et des cellules embryonnaires ; que les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrits et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine ; que le laboratoire dispose des équipements nécessaires à la mise en œuvre de ce protocole de recherche dans des conditions optimales,
Décide :