La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,
Vu le code de la santé publique, notamment les articles L. 2151-5 et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;
Vu la loi n° 2013-715 du 6 août 2013 tendant à modifier la loi n° 2011-814 du 7 juillet 2011 relative à la bioéthique en autorisant sous certaines conditions la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires ;
Vu la décision du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionné à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;
Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 15 octobre 2015 ;
Vu la demande présentée le 31 mars 2015 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (unité UMR 1064) aux fins d'obtenir une autorisation de protocole de recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;
Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 2 juin 2015 ;
Vu les rapports d'expertise en date du 16 et 20 mai 2015 ;
Considérant que le projet concerne l'étude de la qualité de la pluripotence des cellules souches embryonnaires humaines et de la modulation du degré de pluripotence via les conditions de culture, en utilisant des lignées de cellules souches embryonnaires humaines, d'une part, et des cellules directement prélevées chez l'embryon au stade de morula ou de blastocyste, d'autre part ; qu'il est en lien direct avec les résultats obtenus dans le cadre d'une précédente autorisation de protocole de recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines délivrée par l'Agence de la biomédecine à l'équipe de Laurent David le 24 avril 2014 et ayant pour finalité l'étude des déterminants de la pluripotence lors du développement humain pré-gastrulation ; qu'il s'inscrit dans un projet global de reprogrammation et de dérivation des cellules souches embryonnaires humaines (CSEh) en cellules naïves dans des conditions permettant de garder l'état de pluripotence, caractéristique de l'embryon ;
Considérant que la notion de pluripotence est éminemment variable ; que les tests chez l'homme pour en apprécier la qualité et l'étendue sont très limités ; que la pluripotence des cellules souches embryonnaires murines n'est pas équivalente à celle des cellules souches embryonnaires humaines dans la mesure où la pluripotence des premières est proche de celle comparable à la pluripotence des cellules d'un embryon précoce (raison pour laquelle on les appelle cellules souches embryonnaires « naïves »), alors que les cellules souches embryonnaires humaines ont une pluripotence déjà restreinte, correspondant chez la souris au potentiel d'un embryon plus tardif (cellules dites EpiSC) ; que ces cellules, comme les cellules souches pluripotentes induites (iPS), sont dites « amorcées » ;
Considérant que plusieurs équipes essaient aujourd'hui de convertir des CSEh de type « amorcé »en cellules « naïves », au moyen de molécules et en modulant les conditions de culture ; que, d'un point de vue thérapeutique, il serait essentiel de disposer de ce type de cellules, plus stables génétiquement, avec un potentiel plus large et surtout, pouvant être amplifiées en masse en suspension unicellulaire (alors que les CSEh actuelles ne survivent pas dans ces conditions), condition essentielle pour une application thérapeutique à large échelle ;
Considérant que l'objectif de Laurent David est d'obtenir des lignées de CSEh qui aient conservé, dans la mesure du possible, les propriétés des cellules pluripotentes du bouton embryonnaire, soit en dérivant de nouvelles lignées de CSEh à partir d'embryons, soit en tentant de reprogrammer/convertir des CSEh « amorcées »en cellules « naïves »; que celui-ci dispose dans ce cadre d'une base de données issue de la caractérisation des marqueurs moléculaires du bouton embryonnaire, acquise lors de la progression du protocole de recherche autorisé le 24 avril 2014 qui analyse le transcriptome (ensemble des ARN reflétant les gènes exprimés, séquencés par des techniques à haut débit) de cellules individuelles d'embryons humains à différents stades ; que plusieurs molécules et facteurs de croissance ont été mis en évidence par l'équipe, spécifiquement exprimés par l'embryon et non par les cellules souches embryonnaires humaines ; que l'équipe a également mis en évidence des gènes pluripotents spécifiques aux embryons humains et qui pourraient être utilisés pour moduler la pluripotence des CSEh (notamment les facteurs trophoblastiques) ;
Considérant que la demande s'inscrit dans une finalité médicale dont l'objectif thérapeutique est clairement exprimé par l'équipe ; que la connaissance qui découlera de ce projet pourra avoir un impact sur la médecine régénératrice (choix des cellules thérapeutiques en fonction de leur potentiel et qualité), d'une part, et sur les conditions de culture des embryons obtenus par fécondation in vitro, d'autre part, (afin de préserver au mieux le potentiel embryonnaire) ; que les experts reconnaissent la pertinence du protocole, son originalité et l'intérêt que ses résultats peuvent ouvrir dans une perspective de thérapie cellulaire, Laurent David se distinguant par ailleurs des projets internationaux dans la mesure où il se fonde sur la caractérisation des cellules de l'embryon humain (état pluripotent naïf réel) dont il a analysé en détail l'expression génique ;
Considérant qu'en l'état des connaissances scientifiques, elle ne peut être menée sans recourir à des cellules souches embryonnaires humaines ; que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres cellules souches ; que, compte tenu des divergences importantes entre les embryons et les cellules souches humaines et de rongeurs, sur les plans moléculaire et fonctionnel, il n'existe pas d'alternative à l'utilisation des embryons humains ; que la comparaison des cellules souches embryonnaires humaines et des cellules iPS étant l'objet même du protocole, l'utilisation des CSEh apparaît indispensable ;
Considérant en conséquence que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues dans le respect des dispositions législatives et réglementaires ; que les lignées de CSEh utilisées dans le cadre du projet de recherche envisagé, les lignées WA-01 et WA-09 (H1 et H9), proviennent du WiCell Research Institute (USA) ; qu'elles sont déjà présentes sur le territoire national dans la mesure où elles ont été importées par Laurent David en vertu d'une autorisation délivrée par l'Agence de la biomédecine le 11 juillet 2013 après avis favorable de son conseil d'orientation ; qu'à l'occasion de cette demande d'autorisation d'importation, le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et celles en matière d'information et de recueil du consentement des couples a été vérifié et la demande d'autorisation présente de nouveau l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des conditions législatives et réglementaires ; que les deux lignées sont par ailleurs inscrites au registre du NIH, garantissant le respect des principes éthiques fondamentaux de consentement des donneurs, de gratuité du don et d'anonymat prévus pour les cellules souches embryonnaires humaines importées ;
Considérant que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ; que l'équipe est importante et bien structurée, et présente les capacités requises pour mener à bien le programme ; qu'elle explore ce domaine de recherche depuis de très nombreuses années ; que Laurent David, de par sa formation et son expérience, apporte toutes les garanties pour assurer le succès de ce programme de recherche ; qu'il est responsable de la plate-forme de dérivation des iPS à Nantes et maître de conférence des universités - praticien hospitalier (MCU-PH) ; qu'il a bénéficié d'une excellente formation au Canada en développant un projet sur la compréhension moléculaire des étapes de la reprogrammation et qu'il possède une parfaite connaissance de la régulation de la pluripotence, tout à fait adapté au projet qu'il souhaite développer, et une bonne connaissance des techniques appliquées à l'analyse du génome ;
Considérant que la structure est pérenne et l'équipe reconnue internationalement pour ses travaux ; qu'elle bénéficie de l'engagement du directeur général du centre hospitalier universitaire de Nantes ;
Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée ; que cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des embryons et des cellules embryonnaires ; que les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrits et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine,
Décide :