JORF n°0245 du 20 octobre 2019

Décision du 15 juillet 2019

La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,

Vu le code de la santé publique, et notamment les articles L. 2151-5 et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;

Vu la décision du 8 septembre 2015 modifiant la décision 2013-11 du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionnées à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;

Vu la demande présentée le 30 mars 2019 par TreeFrog Therapeutics aux fins d'obtenir une autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;

Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;

Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 7 juin 2019 ;

Vu les rapports d'expertise en date du 24 mai et du 10 juin 2019 ;

Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 4 juillet 2019 ;

Considérant que le projet de recherche utilise la lignée de cellules souches embryonnaires humaines RC-17 provenant de Novo Nordisk, entreprise de santé située au Danemark et spécialisée dans le traitement des maladies chroniques, en particulier le diabète et la maladie de Parkinson ; que cette lignée a été initialement dérivée et produite en conditions de bonnes pratiques de fabrication (GMP) par la société Roslin Cells située en Ecosse ; que la demande d'autorisation de protocole de recherche associe une demande d'autorisation d'importation de cette lignée ;

Considérant que le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et de celles relatives à l'information et au recueil du consentement des couples a été vérifié et le dossier de demande d'autorisation présente l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des conditions législatives et réglementaires ; que la lignée est inscrite au registre du Medical Council for Research qui a fondé en 2002 la UK stem cell bank (Royaume-Uni), garantissant le respect des principes éthiques fondamentaux de consentement des donneurs, de gratuité du don et d'anonymat prévus par le droit national ;

Considérant que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ; que le projet est porté par la société Treefrog Therapeutics dont le responsable de la recherche est le Docteur Maxime Feyeux, docteur en sciences et co-fondateur de la société ; que le reste de l'équipe est constitué de 2,1 ETP, parmi lesquels figurent des docteurs en sciences ou en médecine, des ingénieurs, ainsi qu'une technicienne et un étudiant en thèse ; que tout le personnel impliqué dispose d'une expérience de 1 à 4 ans dans la culture et la différenciation des cellules souches ; que les membres de l'équipe technique sont impliqués à hauteur de 30 à 50 % dans le projet et que la pérennité de la société TreeFrog Therapeutics et le financement du projet sont garantis par la levée de 600 k€, et par l'obtention du prix I-LAB 2018 par BPI France (560 k€) ;

Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée ; que cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des cellules embryonnaires ; que les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrits et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine ; que les équipes disposent des équipements nécessaires à la mise en œuvre de ce protocole de recherche dans des conditions optimales ;

Considérant que la société TreeFrog Therapeutics a acquis une technologie de culture en 3D et d'encapsulation de cellules souches à haut débit ; que cette technologie est basée sur la culture des cellules dans des capsules d'alginate, sur la différenciation de ces cellules in vitro puis sur l'obtention d'organoïdes à partir de ces capsules pluripotentes ; que cette technique permet des conditions de culture proches des conditions physiologiques (environnement contraint en 3D) et une protection du greffon ainsi constitué par la présence d'une barrière physique (capsule) vis-à-vis d'une réaction immunitaire de rejet ; que la preuve de concept d'une telle approche a déjà été apportée et publiée par la société Tree Frog Therapeutics ;

Considérant que le projet de recherche de Maxime Feyeux vise à réaliser un transfert de technologie entre la société TreeFrog Therapeutics et le laboratoire danois Novo Nordisk, spécialisé dans le traitement de maladies chroniques ; que Novo Nordisk a en effet mis au point deux protocoles de différenciation de cellules souches embryonnaires de la lignée RC-17 en neurones dopaminergiques et en cellules béta du pancréas ;

Considérant que l'objectif du projet est d'adapter la culture de ces cellules, qui sont disponibles au grade GMP, aux conditions de culture et d'encapsulation mises au point par la société TreeFrog, puis d'induire leur différenciation ; que les greffons de cellules différenciées seront ensuite inclus dans des essais cliniques en vue du traitement de la maladie de Parkinson (neurones dopaminergiques) et du diabète de type I (cellules béta du pancréas) ;

Considérant que la lignée RC-17 sera importée par la société TreeFrog Therapeutics auprès du laboratoire Novo Nordisk ; que les cellules seront encapsulées et différenciées, puis adressées de nouveau au laboratoire Novo Nordisk pour inclusion dans un essai clinique ; que l'expertise couplée des deux laboratoires apporte les garanties nécessaires à un transfert technologique efficace ;

Considérant que la finalité médicale du projet et l'objectif thérapeutique ne font aucun doute puisqu'ils permettront de mettre au point un traitement pour deux pathologies lourdes (maladie de Parkinson et diabète de type I) pour lesquelles aucune thérapeutique curative n'est disponible à ce jour ;

Considérant que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres types de cellules souches ; que le projet est fondé sur des années de recherche portées par la société Novo Nordisk, qui a mis au point les protocoles de différenciation adéquats pour différencier les cellules souches embryonnaires humaines de la lignée RC-17 en neurones dopaminergiques et en cellules beta ; que cette lignée RC-17 a été dérivée en conditions GMP, condition essentielle à son utilisation dans le cadre du protocole de recherche envisagé ;

Considérant que s'agissant des cellules souches embryonnaires murines et primates, il n'est pas envisageable d'utiliser des cellules d'origine animale alors que l'objectif général du projet est de développer un produit de thérapie cellulaire en vue d'une utilisation en clinique chez l'Homme ; que le recours à des cellules souches pluripotentes induites (IPS), reprogrammées à partir de cellules adultes, n'est pas adapté non plus dans la mesure où les cellules IPS ne reproduisent pas complètement le phénotype des CSEh et tendent à conserver la mémoire épigénétique du tissu somatique d'origine ; qu'elles sont par ailleurs porteuses de mutations spécifiques dues au processus de reprogrammation lui-même ; que les conséquences des anomalies génétiques et des modifications épigénétiques (multiples et différentes pour chaque lignée) créées par le processus de reprogrammation lui-même et le processus de différenciation des cellules iPS sont encore mal appréciées ; qu'une des plus grandes difficultés actuelles est l'extrême hétérogénéité des lignées d'iPS, aggravée par la diversité des techniques de reprogrammation, des conditions de culture et des cellules somatiques d'origine (induisant une "mémoire épigénétique" persistante) ; que les CSEh sont, par comparaison, beaucoup plus homogènes, toutes issues de la masse interne du blastocyste, et spontanément pluripotentes, sans nécessité d'induire des modifications génétiques ou épigénétiques, pour leur conférer cette pluripotence ;

Considérant que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues conformément aux conditions législatives et réglementaires,

Décide :

Article 1

La société TreeFrog Therapeutics est autorisée à mettre en œuvre, dans les conditions décrites dans le dossier de demande d'autorisation, le protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ayant pour finalité l'étude de la l'étude de la compatibilité d'une technologie d'encapsulation et de culture à haut débit de cellules souches pluripotentes induites avec deux programmes de thérapie cellulaire i) de la maladie de Parkinson et ii) du diabète de type I, tous deux portés par Novo Nordisk. Ces recherches sont placées sous la responsabilité de Monsieur Maxime Feyeux.

Article 2

La présente autorisation est accordée pour une durée de cinq ans. Elle peut être suspendue à tout moment pour une durée maximale de trois mois, en cas de violation des dispositions législatives ou réglementaires, par le directeur général de l'Agence de la biomédecine. L'autorisation peut également être retirée, selon les modalités prévues par les dispositions du code de la santé publique susvisées.

Article 3

Toute modification des éléments figurant dans le dossier de demande d'autorisation doit être portée à la connaissance du directeur général de l'Agence de la biomédecine.

Article 4

Le directeur général adjoint chargé des ressources de l'Agence de la biomédecine est chargé de l'exécution de la présente décision, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.

A. Courrèges