La directrice générale de l'Agence de la biomédecine,
Vu le code de la santé publique, et notamment les articles L. 2151-5 et R. 2151-1 à R. 2151-12 ;
Vu la décision du 8 septembre 2015 modifiant la décision 2013-11 du 17 septembre 2013 fixant le modèle de dossier de demande des autorisations mentionnées à l'article R. 2151-6 du code de la santé publique ;
Vu la décision de la directrice générale de l'Agence de la biomédecine du 11 février 2013 autorisant l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Laboratoire I-Stem, Evry) à mettre en œuvre un protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu la demande présentée le 28 février 2018 par l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Laboratoire I-Stem, Evry) aux fins d'obtenir le renouvellement de son autorisation de protocole de recherche sur les cellules souches embryonnaires humaines ;
Vu les informations complémentaires apportées par le demandeur ;
Vu le rapport de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine en date du 7 mai 2018 ;
Vu les rapports d'expertise en date du 22 avril et 30 mai 2018 ;
Vu l'avis émis par le conseil d'orientation de l'Agence de la biomédecine le 21 juin 2018 ;
Considérant qu'une première autorisation a été accordée à cette équipe en 2013 pour une durée de cinq ans. La demande s'inscrit dans la continuité du protocole précédent ;
Considérant que le projet de recherche utilise la lignée SA-001 provenant de Cellartis AB (Suède) ; que déjà présente sur le territoire national, elle a été importée par Marc Peschanski (Inserm UMR 861, CECS, Evry) en vertu d'une autorisation délivrée le 16 février 2005 par arrêté des ministres chargés de la santé et de la recherche dans le cadre du dispositif transitoire mis en place par la loi du 6 août 2004 (article 37) ; qu'à l'occasion de la demande d'autorisation d'importation déposée par Marc Peschanski, le respect des exigences posées par les articles 16 à 16-8 du code civil et de celles relatives à l'information et au recueil du consentement des couples a été vérifié et la demande de renouvellement d'autorisation de recherche présente de nouveau l'ensemble des documents permettant de s'assurer du respect des conditions législatives et réglementaires ; que le conseil d'orientation souligne dans son avis que l'ensemble de ces documents sont de nouveau fournis en annexe ;
Considérant que les titres, diplômes, expérience et travaux scientifiques fournis à l'appui de la demande permettent de s'assurer des compétences du responsable de la recherche et des membres de l'équipe en la matière ; que l'équipe de recherche, dirigée par le Docteur Gilles Lemaitre au sein d'iStem, Génodermatose, et composée principalement d'un responsable d'équipe, d'un responsable de projet et de deux ingénieurs du Centre d'Etudes des Cellules Souches, est compétente et possède toute la légitimité nécessaire pour mener ce protocole ; que le nombre et la qualité des publications attestent de l'excellent niveau de cette équipe ;
Considérant que la structure est pérenne et le financement est assuré ; que l'équipe bénéficie de financements de l'Université Evry Val d'Essonne et de l'Association Française contre les Myopathies ;
Considérant que les locaux, matériels, équipements, procédés et techniques sont adaptés à l'activité de recherche envisagée ; que cette recherche sera effectuée dans des conditions permettant de garantir la sécurité des personnes exerçant une activité professionnelle sur le site, le respect des dispositions applicables en matière de protection de l'environnement, le respect des règles de sécurité sanitaire ainsi que la sécurité, la qualité et la traçabilité des cellules embryonnaires ; que les conditions matérielles de sécurité, de conservation, d'accès, de transferts, de locaux dédiés, de sécurisation desdits locaux, de désinfection, la qualité de l'ensemble des plateaux techniques sont parfaitement décrits et n'ont fait l'objet d'aucune réserve de la part de la mission d'inspection de l'Agence de la biomédecine ; que le laboratoire dispose des équipements nécessaires à la mise en œuvre de ce protocole de recherche dans des conditions optimales ;
Considérant que le projet de recherche de Gilles Lemaitre et Marc Peschanski a pour objectif de proposer un produit cellulaire thérapeutique dans le traitement des ulcères chroniques chez le patient drépanocytaire ; que la demande de renouvellement présentée est la dernière étape d'un projet d'une grande cohérence qui se poursuit depuis une première autorisation délivrée en juillet 2005 ; qu'il émane des recherches fondamentales réalisées dans le laboratoire de Marc Peschanski par l'équipe de Christelle Baldeschi dont faisait partie Gilles Lemaitre ; que cette équipe a démontré et publié en 2009 qu'il était possible, à partir de cellules souches embryonnaires humaines, de dériver une population pure et homogène de précurseurs kératinocytaires capables de s'organiser en un épithélium pluristratifié in vitro, et in vivo dans un modèle animal ;
Considérant que dans ce contexte, l'équipe de Gilles Lemaitre a mené toutes les étapes permettant de concevoir un produit thérapeutique allogénique à partir de ces kératinocytes issus de CSEh afin d'envisager une application chez le patient ; que l'application clinique qui a été choisie est très bien définie : il s'agit d'ulcères chroniques chez des patients atteints de drépanocytose ; que cette maladie entraîne des crises occlusives, synonymes de thromboses, et dues à l'agrégation de globules rouges anormaux dans les petits vaisseaux ; que ces thromboses entraînent des ulcérations chroniques qu'il est très difficile de traiter ; que l'objectif est donc de proposer un « pansement » sous forme de feuillets épidermiques allogéniques issus de cultures de CSEh ; que ce pansement biologique transitoire aurait une double fonction : favoriser la régénération par les propres cellules souches épidermiques du patient, et protéger la peau des agressions par les pathogènes et autres facteurs pro-inflammatoires délétères ;
Considérant que le projet arrive dans sa phase terminale, une demande d'autorisation pour un essai clinique étant prévue courant 2019 ; que cet essai serait mené sur des cohortes de patients déjà constituées ;
Considérant que dans le cadre de la demande de renouvellement, l'équipe a pour objectifs de mettre en œuvre les dernières étapes de développement du produit thérapeutique ; qu'il s'agit principalement de la production des lots clinques qui seront impliqués dans l'essai à venir, et d'études visant à vérifier l'absence de formation de tératomes par la suspension de kératinocytes qui sera utilisée en clinique ; que la demande de renouvellement inclut également la mise au point du prochain produit de thérapie cellulaire présentant plusieurs types cellulaires contenus dans la peau humaine ;
Considérant que la finalité médicale du projet et l'objectif thérapeutique est évidente ; que les aspects techniques sont parfaitement maîtrisés et que toutes les garanties sont réunies pour mener à bien les dernières étapes ; que la perspective d'essais cliniques est réelle pour des patients en attente de traitement pour des affections particulièrement sévères et sans solution à ce jour ;
Considérant que le résultat escompté ne peut être obtenu par d'autres moyens, notamment par le recours exclusif à d'autres types de cellules souches ; que s'agissant des cellules souches embryonnaires murines et primates, il n'est pas envisageable d'utiliser des cellules d'origine animale alors que l'objectif général du projet est de développer un produit de thérapie cellulaire en vue d'une utilisation en clinique chez l'Homme ; que le recours à des cellules souches pluripotentes induites (IPS), reprogrammées à partir de cellules adultes, n'est pas adapté non plus dans la mesure où les cellules IPS ne reproduisent pas complètement le phénotype des CSEh et tendent à conserver la mémoire épigénétique du tissu somatique d'origine ; que ces cellules sont par ailleurs porteuses de mutations spécifiques dues au processus de reprogrammation lui-même ;
Considérant que les conséquences des anomalies génétiques et des modifications épigénétiques (multiples et différentes pour chaque lignée) créées par le processus de reprogrammation lui-même et le processus de différenciation des cellules iPS sont encore mal appréciées ; qu'une des plus grandes difficultés actuelles est l'extrême hétérogénéité des lignées d'iPS, aggravée par la diversité des techniques de reprogrammation, des conditions de culture et des cellules somatiques d'origine (induisant une "mémoire épigénétique" persistante) ; que les CSEh sont, par comparaison, beaucoup plus homogènes, toutes issues de la masse interne du blastocyste, et spontanément pluripotentes, sans nécessité d'induire des modifications génétiques ou épigénétiques, pour leur conférer cette pluripotence ;
Considérant que, compte tenu de ces incertitudes, la communauté scientifique et médicale s'accorde sur le fait que pour les prochaines années, les CSEh apparaissent en l'état actuel des connaissances plus sûres et saines pour le type d'application envisagé dans le programme de Gilles Lemaître, ce qui justifie le choix des CSEh ;
Considérant que le demandeur apporte les éléments suffisants concernant la pertinence scientifique du projet de recherche d'une part, et ses conditions de mise en œuvre au regard des principes éthiques d'autre part ; qu'il justifie en particulier que le projet sera mené dans le respect des principes éthiques relatifs à la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires humaines et que ces cellules ont été obtenues conformément aux conditions législatives et réglementaires,
Décide :